X
de Ti West
Horreur
Avec Mia Goth, Jenna Ortega, Scott Mescudi
Sortie le 4 mai 2022
Après les rites sataniques et les fantômes, Ti West rend hommage au slasher dans une toute nouvelle franchise estampillée A24. Reproduction scolaire ou nouveau porte-étendard du genre ?
Alors qu’Hollywood re-re-reboote les franchises phares de son cinéma d’horreur avec la nouvelle trilogie Halloween de David Gordon Green, le passage de flambeau initié par le très moyen et opportuniste Scream 5 et l’infâme Texas Chainsaw Massacre produit par Netflix, A24 met en chantier sa toute première franchise horrifique. Souvent considérée comme rampe de lancement de l’elevated horror (terme prétentieux et marketing pour catégoriser un cinéma d’horreur qui serait “auteurisé”) après avoir mis en avant les créations de Ari Aster (Hereditary, Midsommar) ou encore Robert Eggers (The Witch), la société de production américaine confie les rênes de ce nouveau projet à Ti West, cinéaste méconnu du grand public.
Au fil des années, le réalisateur a néanmoins réussi à se créer une fanbase d’amateurs nostalgiques grâce à une filmographique qui suinte l’amour du cinéma d’horreur américain des années 70-80 par tous les pores de sa pellicule. Après s’être essayé à la tendance “rites sataniques” et babysitter en détresse dans The House of the Devil, au film de fantômes dans The Innkeepers ou au found-footage avec The Sacrament, revisitant par la même occasion le drame de Jonestown, West s’inspire avec X de la vague de slasher initiée par le Massacre à la Tronçonneuse de Tobe Hooper.
Prenant place dans un Texas semblable à son aîné, X suit une équipe de tournage venue réaliser un film pornographique dans une ferme louée à un couple de personnes âgées. Lorsque ces derniers découvrent ce qui se trame dans leur dos, le plaisir laisse place au massacre. Là où la plupart des slashers de l’époque confrontaient une frange conservatrice et puritaine des Etats-Unis face à une jeunesse considérée comme déviante à cause de sa quête d’amour libre, West ajoute une dimension supplémentaire aux motivations de ses antagonistes. Dans X, il n’est pas question de punir une génération perdue mais de faire exploser des frustrations canalisées depuis des années par un couple de seniors.
Décrépitude, misère sexuelle, isolement. A partir de ces thématiques, West inverse l’un des codes du slasher qui voyait un personnage masculin s’attaquer à de jeunes femmes en faisant de Pearl, ancienne danseuse désormais octogénaire, l’antagoniste principale. Obsédée par le personnage de Maxine (excellente Mia Goth, qui interprète les deux personnages), actrice porno se rêvant célèbre entre deux lignes de cocaïne, elle projette en elle ses fantasmes mais y retrouve également la femme qu’elle était autrefois. Des traits qui confèrent une touche d’humanité et de mélancolie bienvenue dans le film.
Malheureusement, si West donne un léger coup de poliche à un genre déjà exploité et déconstruit à de nombreuses reprises, il souffre de l’amour qu’il lui porte. Malgré sa photographie granuleuse, ses passages en Super 8 et une première heure qui prend son temps pour installer son ambiance, X donne trop souvent l’impression d’assister à une reconstitution mécanique de ce qui a déjà été fait et désamorce en un clin d’œil toute trace de tension. Reste un jeu de massacre jouissif et pas inintéressant pour autant, bien aidé par son côté “film dans le film” lui permettant un équilibre bien dosé en autodérision et horreur pure.