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    Vivian Maier pose pour la bande dessinée dans Vivian Maier : Claire-obscure

    Scénario : Sowa
    Dessin : Emilie Plateau
    Éditeur : Dargaud
    Sortie : 26 janvier 2024
    Genre : Biographie, documentaire

    Inconnue de son vivant, Vivian Maier aurait été bien surprise de l’engouement qu’elle suscite aujourd’hui, elle qui s’est donnée à la photographie sans jamais ne rien demander en retour. En plus de la qualité de son travail, c’est cette abnégation qui l’a promue au rang de légende. Nous raffolons de ces histoires ; une camionneuse septuagénaire qui achète par hasard un Pollock dans un garage sale, la success story d’une nounou légèrement atteinte du syndrome de diogène qui dégaine compulsivement son Rolleiflex. Il a suffi d’une vente aux enchères qui a attiré le voisinage, dont le lot était le contenu du boxe débordant de ses tirages, pour que la magie opère. La crème des galeries américaines se l’arrache. Elle a inspiré deux films. Gaelle josse lui consacre sa Femme en contre-jour. Et aujourd’hui, Emilie Plateau et Marzena Sowa la mettent en case.

    Graphisme minimaliste

    Dans un graphisme très (peut-être trop) minimaliste, les deux autrices balaient presque un siècle d’existence. Un brin d’enfance dans le Champsaur. Une dévotion de dix-sept ans à la famille Gensburg qui l’emploie comme gouvernante. Sa mise à pied, une fois les enfants grandis. Et enfin son rôle de Mary Poppins, volant d’une maison à l’autre, pour offrir ses services. Comme le laisse entrevoir ses fameux autoportraits, Vivian Maier est atypique. Une nounou inoubliable qui soigne les maux de tête avec des boîtes en carton. Une personnalité caricaturale attifée d’un long manteau et d’un chapeau rond.

    Dans la bande dessinée qu’elles lui dédient, Plateau et Sowa compile ses moments de vie comme on organise un album photo. Ce sont des instantanés qui s’enchaînent, dont l’immobilité est renforcée par le dessin des personnages toujours de face comme dépouillés de leur tridimensionnalité. Leurs positions qui manquent de souplesse, les membres toujours en angle droit, donnent l’impression qu’ils sont sans cesse en train de poser étrangement. Assumons ce qu’une photo a de statique, dans le temps comme dans l’espace, claironnent-ils. Et pourtant à cette simplicité dans les attitudes, se heurte une attention qui confine à l’obsession dans le dessin de la végétation.

    Mais Vivian Maier titillait le déclencheur avec rigueur et acharnement. L’impressionnante quantité de photographies qu’elle laisse en héritage a donc valeur de témoignage. Des âmes les traversent, chargées du poids de leur propre récit. Si les deux autrices survolent le caractère historique du travail de Vivian Maier qui ne cachait pas son engagement politique – quelques pages sont consacrées au regard qu’elle portait sur les campagnes républicaines et sur le ségrégationnisme aux États-Unis – elles occultent complètement son humanisme. Et comment aurait-elle pu faire autrement ? Le choix d’un dessin simplifié paralyse les subjectivités ; les personnages sont interchangeables dans leur expressivité, ou plutôt dans leur inexpressivité. Vivian Maier : Claire obscure, même si son parti pris graphique s’explique, peine malheureusement à nous transmettre les émotions que la photographe savait si bien capturer.

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