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    Vivian Maier : rétrospective d’un acte photographique de résistance

    Personnage de l’ombre de son vivant, Vivian Maier est une photographe issue de l’émigration autrichienne qui a accédé de manière posthume à une gloire mondiale. C’est avec les enfants que son âme d’artiste et son enfance intérieure se développe, car c’est comme gouvernante qu’elle travaille de New York à Chicago. Bien chapeautée et bien chaussée, son élégance est réservée et sa stature impénétrable et rigide. Cette attitude en fait un personnage marquant la rétine. BOZAR apparaît ainsi comme un lieu parfaitement adapté pour rendre hommage à son œuvre, à travers l’exposition L’autoportrait et son double.

    Ombres, réflexion et miroir

    Ombre, réflexion et miroir sont les concepts qui découpent la trame curatoriale de l’exposition L’autoportrait et son double en trois parties. Une quatrième salle est par ailleurs destinée aux photographies couleurs et au cinéma, dont on peut relever la dimension expérimentale et inachevée, intrinsèque aux problématiques de la nouvelle vague. Une façon de clôturer l’exposition sur une ouverture concernant la maîtrise esthétique et technique. Prolifique et inventive, cette réflexion imagée constitue un véritable trésor, une richesse que la commissaire Anne Morin – qui a accompli un grand travail d’archiviste – tient à souligner.

    Grâce à un tri minutieux, les photographies de Vivian Maier sont mises en valeur pour refléter la cadence obsessionnelle de sa carrière, qui est restée secrète durant plusieurs années. L’évolution de la démarche artistique n’est pas au cœur de l’évènement. Il s’agit plutôt de la narration d’un langage visuel si unique qu’il en devient extraordinaire. Car le caractère singulier d’une telle production tient de l’acuité visuelle sidérante de l’artiste. La chronologie est donc plus « chronique » que progressive.

    Self-Portrait, Chicago, IL, 1956. ©Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY.
    Self-Portrait, Chicago, IL, 1956. ©Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY.

    Une « chineuse d’images »

    L’espacé aéré et lumineux dédié à l’exposition permet d’exprimer avec clarté cette déclinaison de « chineuse d’images » et d’en extraire la patte artistique et humaine. En confluence entre la photographie américaine et humaniste, les clichés urbains de Maier exercent une influence réfléchie sur l’espace qu’elle occupe et habitent la salle d’exposition. L’esthétique du frôlement renforce la mythologie qui imprègne ces visuels. À travers son Rolli Flex fétiche, souvent reflété dans un miroir, la culture de l’autoportrait est cultivée dans toute sa duplicité.

    Le selfie chez Maier, ne s’exprime pas dans une optique d’affirmation de soi, mais de l’apprivoisement du territoire et de l’incarnation de la personne en lui. La possibilité d’une identité double se dessine, plutôt qu’un culte de la personnalité. En excluant sourire et manières – tout en diluant un souffle de second dans ses portraits et autoportraits – elle contourne les préceptes narcissiques dont on entoure les selfies. Une hardiesse humble et directe : exclue du cercle mondain, son travail artistique devient acte de résistance pour les personnages de l’ombre.

    Self-portrait, New York, NY, May 5, 1955 ©Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY.
    Self-portrait, New York, NY, May 5, 1955 ©Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY.

    Un regard de femme

    La rétrospective de L’autoportrait et son double est également un rappel concernant la discrimination au travail des femmes et des gens issus des classes modestes dans le milieu culturel. L’œuvre de Viviane Maier devient, à travers l’exposition, un vecteur pour communiquer des revendications inhérentes au marché de l’art et un outil pour aller au-delà de ses conventions. L’occasion de réparer le passé et d’honorer une réflexion photographique qui inspire amateurs comme professionnels.  Un déclenchement universel intriguant pour tout type de public. Voyage après voyage, la formulation visuelle choisie par Maier préserve la même typographie et sonne comme un rituel à la fois contestataire et protecteur.

    Infos pratiques

    • Où ? BOZAR, Palais des Beaux-Arts, Rue Ravenstein 23, 1000 Bruxelles.
    • Quand ? Du 8 juin au 21 juillet 2022, de 10h à 18h (sauf le lundi).
    • Combien ? 10 EUR tarif plein. Tarifs réduits disponibles.

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