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    Versailles, côté parking

    De château et d’élite, il n’en est pas question dans cette fable baroque bien frappée. Ici, les intrigues se nouent et se dénouent dans les coulisses où l’air est vicié par les caprices de la haute bourgeoisie dorée. Alors que la fête dégénère à l’intérieur dans une ambiance de fin du monde, le parking deviendra le théâtre d’une comédie humaine cynique et désenchantée où l’intérêt personnel éclipsera peu à peu le bien commun.

    Le champagne coule à flot et cela court dans tous les sens. A Versailles, lieu de raffinement par excellence, l’élite a décidé, le temps d’une soirée, de renouer avec la beauté des siècles passés. Pour redonner l’éclat des fastes d’antan, des musiciens costumés ont été recrutés. Mais pour des raisons de sécurité, ils sont confinés sur le parking. La musique baroque est retransmise du parking par l’intermédiaire d’un microphone et d’un écran afin de préserver comme il se doit l’entre-soi. Entre un vigile intrusif, une chargée d’événements survoltée et une serveuse qui n’en finit pas de passer les plats, la troupe se sent très vite à l’étroit. Et la chaleur accablante, la soif, les exigences musicales de la jet-set, le mépris des employés ne font qu’augmenter la tension. Dans un monde en perte de repères, Versailles, bâtie sur des sols marécageux, étouffe et vacille.

    Ce semi-opéra baroque, écrit par Sofia Betz avec la collaboration de deux chanteurs, Julie Calbete et Romain Dayez, utilise un récit décalé pour mieux faire comprendre le réel. Dans Versailles, le monde des paillettes est délaissé au profit de celui des ombres afin de donner la voix aux marges de notre société. Dans l’envers du décor, on perçoit la servitude des artistes qui cachetonnent, à la merci de ceux qui les emploient, et des serveurs qui triment sans relâche pour satisfaire le moindre besoin de leurs clients fortunés. Outre la lutte des classes, cette comédie déjantée aborde également celle du réchauffement climatique qui touche toutes les couches de la société et nous rappelle la vanité des richesses face à l’inévitable déclin de notre planète. 

    Dans cette fête en pure absurdie, les résonnances entre le passé et le présent sont frappantes. La période de flottement et d’incertitude dans laquelle nous vivons renvoie à celle de l’époque baroque où grondaient une colère sourde et un mal-être certain. Tout comme aujourd’hui, l’humanité était en perte de repères, ayant perdu la foi, consciente de laisser derrière elle un ancien monde.

    Le Théâtre des Martyrs nous a offert une soirée mémorable, où musique baroque et comédie se sont entrelacées avec brio. Les voix envoûtantes des chanteurs (Marie-Laure Coenjaerts, Romain Dayez et Julie Calbete), portées par le clavecin électronique de Catherine De Biasio, ont apporté une expérience musicale surprenante. En parallèle, les comédiens (Julien Rombaux en vigile, Héloïse Jadoul en chargée d’événements et Laurie Degand en serveuse) ont assuré parfaitement le service en ajoutant une touche d’humour noir et de légèreté à l’ensemble de cette fête au parfum suranné.

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    De Sofia BetzAvec Julie Calbete chant (soprano) et arrangements, Marie-Laure Coenjaerts chant (mezzo soprano), Catherine De Biasio chant et arrangements, Romain Dayez chant (baryton) et arrangements, Laurie Degand comédienne (la bonne), Héloïse Jadoul comédienne (la cheffe), Julien Rombaux comédien (le vigile)Du 17 au 22 décembre 2024Au Théâtre des Martyrs De château et d’élite, il...Versailles, côté parking