Ecriture et mise en scène de Carole Lambert avec Amandine Chevigny, Guillaume Druez, Morgane Gilles et Louis Marbaix. Du 13 au 24 novembre 2018 du Rideau de Bruxelles au Marni.
Tu fais la femme est une pièce de théâtre écrite et dirigée par l’écrivaine Carole Lambert et jouée par quatre comédiens. C’est au Conservatoire de Mons qu’ils se rencontrent tous, et qu’ils décident de monter ce spectacle ensemble.
Tout commence avec un titre : « tu fais la femme ? ». A cette question démarre un jeu, qui n’a pas réellement de début ou de fin, où les comédiens intervertissent leurs rôles à volonté. Comme dans une cour de récréation, ils sont et font ce qu’ils veulent. C’est un joyeux fourre-tout d’actions, de récits et d’images surréalistes qui se présente face à nous. Les crêpes sautent, les biscuits étouffent, un chat parle… Chaque objet se retrouve investi d’un rôle bien particulier. Les corps virevoltent du combat à la danse. Tels des pantins, ils subissent leurs états d’âmes sans libre-arbitre. Ils vivent, meurent et ressuscitent comme ils changent de chemises.
Ces multiples récits superposés défilent sans nous laisser entrevoir une fenêtre d’entrée. Nos yeux s’affolent au rythme des acteurs, mais sans aucun enjeu. La pièce revendique le dénuement de sens. Pourtant, si elle est là devant nous, c’est bien qu’elle cherche à dialoguer avec son spectateur. Là où le réalisme échoue, l’absurde, quand il résonne, a le pouvoir de traduire avec une grande vérité les rapports sociaux. Ici, il nous laisse impassible.
Il semble que Tu fais la femme parle de « l’ennui » mais à un rythme toujours très soutenu, d’un « jeu » mais sans initiatives, du « rien » mais avec beaucoup d’informations. Les mots défilent dans un ping pong de parole, sans conséquences. Eux qui sont pourtant une arme redoutable dans l’absurde, n’ont pas l’air ici d’avoir d’impact sur scène.
La scénographie est présentée comme un grand terrain de jeu vide où sont éparpillés différents accessoires. Tout comme la mise en scène, elle semble ne pas rendre service aux interprètes puisqu’il n’y a aucun repère. Or, ce n’est ni dans le texte, ni dans le jeu déjà au summum de l’absurde, qu’ils peuvent trouver du « concret », ce que la pièce semble fuir à tout prix. Alors que Carole Lambert fait référence à Ionesco, lui, pourtant, concrétisait son absurde dans un écho terrible et juste à la société.
L’absurde nous est apparu illustré, peut être même vécu, mais jamais réellement ressenti. Néanmoins, les comédiens y croient et sont généreux dans leurs interprétations. Ils réussissent à jongler avec différentes casquettes, sans jamais lâcher le morceau. Ils sont attachants, parfois très justes, et ne manquent pas de nous faire rire. Malgré leur énergie, nous sommes au final sortis de Tu fais la femme avec l’impression de ne pas avoir eu la clé de leurs histoires. Peut être aurait-il fallu la saisir au vol ?