Tu dors Nicole ?
de Stéphane Lafleur
Drame, Comédie
Avec Julianne Côté, Pierre-Luc Lafontaine, Luc Senay
Sorti le 8 juillet 2015
Présenté à la Quinzaine des réalisateurs lors du festival de Cannes en 2014, Tu dors Nicole ? est le portrait québécois d’une adulescente et un nouvel exemple de cette génération Y occidentale qui n’en finit plus de se chercher sans se trouver. Salué à divers égards, le film s’avère pourtant assez statique et risque d’en larguer plus d’un(e)s en cours de route.
À Montréal, Nicole Gagnon, 22 ans, entame un été monotone entre ses insomnies, son boulot dans une friperie et les heures à trainer avec son amie Véronique. En l’absence de ses parents partis en vacances, elle cohabite dans la maison familiale avec son frère et les deux membres de son groupe de musique, dont le nouveau batteur qui attire l’attention de Véronique.
Si a priori le film de Stéphane Lafleur annonçait un Frances Ha de la Belle Province, le résultat final est cependant plus proche du film d’auteur anecdotique que de la comédie dramatique de Noah Baumbach. Il y a pourtant quelques parallèles. Initialement tourné en couleur, Tu dors Nicole ? a été remis en noir et blanc sur les conseils de Sarah Mishara, directrice de la photographie. Une idée à saluer, car outre la beauté visuelle cela confère à l’oeuvre l’intemporalité louée par son réalisateur.
En phase avec cette esthétique, les acteurs affichent un naturel impressionnant, particulièrement Julienne Côté présente dans (presque) toutes les scènes pour incarner Nicole. Auto-proclamée reine des ourlets, ce personnage s’empêtre dans une indécision existentielle toute moderne et oscille mollement entre l’adolescence et l’âge adulte. Cet entre-deux est amplifié par la canicule et ses insomnies qui l’amène à vivre des instants oniriques durant la nuit ou au crépuscule. Son quotidien est troublé par les répétitions du groupe de son frère autoritaire joué par Marc-André Grondin (Le premier jour du reste de ta vie, C.R.A.Z.Y.). Le réalisateur tenait particulièrement à cette intrusion musicale : « J’aimais l’idée d’un groupe de rock qui habiterait le film sans en être le sujet […]. En général, on filme surtout la performance d’un groupe, mais plus rarement les balbutiements et les errements d’une musique en devenir. […] Je voulais que la musique soit envahissante, qu’elle soit un élément étranger qui perturbe les plans de Nicole. »
Le film révèle une bonne maîtrise et de l’inventivité avec des touches savoureusement décalées. Comme Nicole qui laisse des handicapés hilares après les avoir traités d’attardés ou les passages avec Martin, 10 ans, 1m20 les bras levés et 40kg tout mouillé qui, de sa voix de baryton, fait des déclarations d’amour à Nicole et lui donne des leçons de vie.
Mais. Mais. L’impression générale est l’ennui. Celui que traine Nicole et dans lequel le spectateur se prend les pieds. Peu de choses se passent dans l’inanité d’un été où le temps est aussi ramolli qu’une montre de Dalí. L’histoire d’une saison estivale « platte » se révèle être un film « platte » que ne sauve pas notre enthousiasme forcé pour le batteur « cute » à la coupe mulet. Malgré d’indéniables qualités, Tu dors Nicole ? est surtout un sédatif arty pour hipsters insomniaques.