Sing Sing
Réalisateur : Greg Kwedar
Genre : Drame
Acteurs et actrices : Colman Domingo, Clarence Maclin, Sean San Jose
Nationalité : USA
Date de sortie : 5 février 2025
Sing Sing est un film sur le programme RTA, Rehabilitation Through the Arts, dans une prison de sécurité maximale (à Sing Sing, près de New York). On suit un groupe d’hommes, dans une prison que l’on se doute pour hommes exclusivement, participer au processus de création d’une pièce pour aboutir à un spectacle final alors que certains attendent leur libération prochaine de prison.
La grande force du film est son indistinction presque permanente entre la réalité et la fiction. Il y a une mise en scène (il est dirigé par l’inconnu Greg Kwedar) fictionnel et pourtant on se demande par moments comment certains passages ont pu être filmés, révélant une vérité des personnages.
Tout d’abord, ceux-ci apparaissent et disparaissent à la fois, à travers la physiologie des hommes devant nous, qui laissent passer beaucoup de choses touchantes par un regard, leur visage marqué, une coiffure, des tatouages. Des hommes, principalement afro-américains ou d’origine latine, qui semblent avoir vécu une réalité qui n’est pas celle de l’acteur pro sortant de son école d’acting, une réalité plus dure, la vie en prison notamment.
Ensuite, le film se passe entièrement dans la prison, ses intérieurs et extérieurs, et semble avoir été filmé dans cette vraie prison (même si je n’ai pas fait de recherche particulière le prouvant), d’où cette indistinction entre réalité et fiction. Les « chambres » sont aussi minuscules autant que la salle pour répéter est grande, en comparaison avec le petit groupe d’acteurs en devenir. Pour autant, Sing Sing n’est pas un film de prison type Un prophète ou La Grande Evasion, avec ses passages obligés sous la douche. S’il y a bien des scènes d’intimidation, de masculinité extrême qui doit être affirmé dans ce haut lieu de testostérones, ce sont des scènes qui illustrent et appuient la trajectoire de vie de Clarence « Divine Eye » Maclin, qui joue son propre rôle.
Le scénario est assez brillant car il n’illustre jamais rien. On suit discrètement Clarence de sa vie de mec qui fait sa loi dans la cour de la prison à son bien-être progressif pris au cours de théâtre, tandis que John Divine, joué par Colman Domingo, personnage à l’initiative du programme RTA à Sing-Sing, fait ce qu’il peut pour intégrer Clarence dans l’équipe. De nouveau, pas de passages obligés, la scène du « oh le théâtre de toute façon cela ne sert à rien » viendra (on pense au film avec Kad Merad, Un triomphe), mais pas comme on s’y attendait. Ici, est pris directement pour acquis que le théâtre est là pour fait du bien à ces hommes qui n’ont pas l’occasion de s’épancher sur leurs sentiments. La plus belle scène du film est d’ailleurs probablement celle où à tour de rôle, ils doivent raconter le moment de leur vie où ils ont été le plus heureux, où ils doivent montrer leur faiblesse, leurs fragilités.
Ainsi, le génie de Sing Sing est dans son casting, dans l’alchimie qui règne entre ces mecs, le respect et le soutien qu’ils s’apportent. De nouveau, les acteurs professionnels sont suffisamment bons pour ne pas trop jouer, ils comprennent qu’ils doivent se mettre au diapason et Colman Domingo est d’un naturel époustouflant, même si on distingue le professionnalisme de l’acteur entouré des autres qui n’ont pour autant rien n’a démérité. Paul Raci, qui joue le professeur de théâtre, est un exemple aussi d’acteur dont on comprend la puissance dans cette capacité à ne pas trop en faire.
Le film ne s’embarrasse quasiment jamais de psychologie ou ne cherche pas à interroger la raison même du programme : ces hommes sont dans une prison de sécurité maximale, certains ont tué, ils ont servi « leurs dettes » à la société en passant X temps en prison, et le théâtre est au service de ce groupe pour qu’ils reviennent émotionnellement plus forts « parmi nous ».