Shazam!
de David F. Sandberg
Action, Fantastique
Avec Zachary Levi, Asher Angel, Mark Strong
Sorti le 3 avril 2019
Après Aquaman en décembre, DC lance Shazam!, sixième film de sa programmation cinématographique. Jusqu’ici, DC tentait péniblement d’imiter le gigantesque projet Marvel et c’était souvent raté. Pourtant, il semblerait qu’avec Shazam!, comme par magie, DC ait trouvé la recette du film de super-héros qui tient la route et ce, contre toute attente.
Vous avez dit Shazam ? Comme l’application de reconnaissance musicale ? Il faut dire que Shazam est un héros peu connu, et pour cause : initialement appelé Captain Marvel, ce dernier est créé par la compagnie Fawcett Publications, éditeur de comics dans l’ombre de Marvel et DC, qui veut imiter Superman. Ainsi, le héros est doté de la sagesse de Salomon, de la force d’Hercule, de l’endurance d’Atlas, de la foudre de Zeus, du courage d’Achille et de la vitesse de Mercure. Même si c’est présenté poétiquement, DC ne tombe pas dans le panneau : c’est bel et bien un Superman tout craché. DC accuse donc Fawcett de plagiat et la petite maison d’éditions se retrouve au pied du mur. Marvel reprendra la dénomination Captain Marvel et créera le personnage démultiplié apparu il y a quinze jours à l’écran tandis que DC rachètera Fawcett Editions et son héros, changeant son nom en Shazam en 2011 pour pouvoir diffuser ses aventures sans entrer en conflit avec Marvel.
Shazam est donc un super-héros peu affirmé dans l’univers des Comics, au coeur de la guerre des brevets que se livrent Marvel et DC depuis longtemps. On est en droit de se demander si DC ne s’est pas tiré une balle dans le pied en sortant Shazam! deux semaines après le Captain Marvel… DC n’en serait pas à sa première erreur (comment ont-ils pu légalement sortir un film aussi mauvais que Suicide Squad par exemple) et la bande-annonce de Shazam! ne présage absolument rien de bon : on s’attend à un film de super-héros de seconde zone raté.
Et pourtant, contre toute attente, Shazam! tient la route en tant que film de super-héros. Le scénario, s’il est dichotomique comme tout film de super-héros, fonctionne plutôt bien : le héros est avant tout égoïste et solitaire, ne veut pas être super et le devient presque par erreur, tandis que le méchant a, au vu de son histoire, de bonnes raisons d’être méchant. La dichotomie, classique dans un film de super-héros, est donc légèrement nuancée dans Shazam! et c’est plutôt appréciable. Autre bon point : le héros est un gamin de quatorze ans, ce qui n’est jamais le cas dans les comics (nous n’avons pas d’exemples flagrants en tête du moins). C’est donc un héros adapté à son public principal et ça aussi, c’est plutôt une bonne idée. On se demande même pourquoi il est un des seuls héros adolescents dans l’univers des Comics. Enfin, le fait qu’il se métamorphose en Shazam (il passe de l’adolescent fluet à l’homme accompli – qui ressemble très fort à Superman, bah tiens) dès qu’il prononce son nom est assez original et il utilise ce pouvoir à plusieurs reprises pour se sortir de certaines impasses.
Toutefois, s’il tient la route scénaristiquement, Shazam! n’est pas parfait non plus. En présentant un héros adolescent, DC s’adresse ouvertement à un public adolescent et ne prétend même pas intéresser les adultes, si ce n’est les plus fans d’entre eux. Également, le film caricature le super-héros omnipotent, essaye d’en rire, mais c’est un coup d’épée dans l’eau : le film n’est pas particulièrement drôle. Il essaye mais échoue, ce qui provoque un léger malaise chez le spectateur.
En partant du principe qu’on ne peut comparer un film de super-héros à un film d’un autre genre, que quand on va voir un film comme ça, on accepte de payer pour des scénarios dichotomiques simplistes réservés à un public adolescent demandeur d’effets spéciaux, alors Shazam! s’en sort plutôt pas mal. Néanmoins, on le savait et Shazam! le souligne encore : comment DC, et Marvel, peuvent-ils remplir à ce point les salles en s’adressant à un public si restreint ?