auteur: Raphaël Jerusalmy
édition: Actes Sud
sortie: janvier 2018
genre: roman
La Rose de Saragosse n’est pas une femme ni même une fleur. Elle est pourtant les deux tout à la fois, réunies en un emblème, une signature gravée au bas des pamphlets qui font trembler et exacerbent la soif de purification par le feu des hérétiques de l’évêque Torquemada, le Grand Inquisiteur, en cet an de grâce 1485.
Angel de la Cruz est un familier, un noble sans fortune devenu mercenaire à la solde du plus offrant. Passionné par la gravure et ayant lui-même un très bon coup de crayon, il est par le hasard des choses chargé d’enquêter et de retrouver l’auteur de ces grotesques caricatures.
Cette mission amènera Angel à croiser la route de Léa de Montesa, fille d’un riche négociant juif également grand connaisseur de gravures. Alors qu’il a toujours raillé ce monde qui le rejetait, le mercenaire se prend à vouloir en faire partie pour assouvir son besoin de (re)connaissances. Et la jeune Léa, dont les traits sont si parfaits, ne cesse de le hanter et de guider sa main qu’elle soit armée d’un fusain, d’un stylet ou d’une rose… Il est très loin de se douter que Léa est celle qui dessine et fait publier ces fameux pamphlets qui sèment le trouble dans la ville de Saragosse.
Raphaël Jerusalmy déploie, dans ce roman court mais intense, une histoire qui fait d’une certaine façon référence au développement intérieur: comment une passion qui nous dépasse peut finalement être une voie à suivre pour trouver un véritable sens à sa vie que ce soit dans l’acceptation ou le renoncement.
Avec pour toile de fond, la période de la Grande Inquisition qui sévissait en Espagne à la fin du XVe siècle et la terreur qu’elle répandait comme une traînée de soufre, l’auteur développe une histoire parallèle qui prend autant pied dans le monde de la gravure que de la religion. Son style est direct, ponctué de phrases courtes et concises. Il va droit au but sans se perdre dans nombre de circonvolutions inutiles qui n’auraient fait qu’alourdir son récit. Cette sorte de densité dans le dépouillement permet d’avoir au final un roman agréable à lire. Et grâce à La Rose de Saragosse, la gravure n’aura jamais semblé aussi élégante ni aussi pénétrante à l’âme.