Rétrospective / Exposition / Performance Apichatpong Weerasethakul
Du 12 avril au 29 mai 2016
Kunstenfestivalarts et Cinéma Galeries, Galerie de la Reine 26 – 1000 Bruxelles
Le Cinéma Galeries présentait mercredi, dans sa rétrospective consacrée à Apichatpong Weerasethakul, un film rare du cinéaste : son troisième long métrage, dirigé en collaboration avec l’acteur principal Michael Shaowanasai, et dont la réalisation est intervenue en 2003 entre deux projets plus ambitieux (Blissfully Yours et Tropical Malady), afin de continuer à faire travailler sa boîte de production, Kick the Machine.
The Adventure of Iron Pussy prend la forme d’une parodie de film d’espionnage et de tout un pan du cinéma thaïlandais commercial, en y introduisant le personnage atypique d’Iron Pussy, agent-secret travesti. L’acteur et performeur Michael Shaowanasai reprend ici un personnage qu’il a créé dans des courts métrages et instaure autour de celui-ci un univers de série Z. Le film est une sorte de nanar assumé qui mêle comédie potache, romantisme dégoulinant et tableaux chantés et dansés, le tout entièrement doublé en post-production.
Il en résulte donc une impression bizarre, le sentiment de voir l’indiscutable navet d’un grand cinéaste. Et pourtant, même dans un ensemble informe, d’abord amusant puis très vite lassant, on se prend à sauver l’une ou l’autre chose, comme ces séquences muettes entrecoupées d’intertitres, ou encore la façon dont est abordée la mutation sexuelle du personnage principal. Au début, Michael Shaowanasai passe de manière alternative de son costume d’Iron Pussy à son apparence quotidienne de petit chauve à lunette. Mais, à partir du moment où il est envoyé en mission au sein d’une riche famille aux occupations louches, il demeurera dans le rôle d’Iron Pussy jusqu’à la fin du film, désigné comme femme sans qu’aucune ambiguïté ni aucun doute ne soit possible.
Au final, ce petit film mineur a donc un gros potentiel de film culte, de par son apparence de nanar et surtout par son côté « queer » alternatif. Il demeurera probablement comme une curiosité dans la carrière de Weerasethakul, même une fois restauré – il devrait l’être au cours de l’année. En attendant, le Cinéma Galeries le présentait dans une copie Betamax, renforçant encore l’impression de voir un film confidentiel, perdu et retrouvé, aux dehors modestes mais à l’importance secrète. Pas sûr que cette impression demeure une fois le film nettoyé et remasterisé, passé au lissage d’une édition DVD ou Blu Ray finalement passe-partout.