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    Rencontre avec Dominik Nicolas, ancien guitariste d’Indochine

    Nous sommes allé à la rencontre de Dominik Nicolas qui vient de sortir La beauté de l’idée, son premier album solo depuis son départ du groupe Indochine. (Lire la chronique du disque en cliquant ici)

    Voici l’interview exclusive qu’il nous a accordé pour nous parler de ce superbe album.

    Bonjour Dominik Nicolas, merci pour cette interview.

    Pour commencer, pourriez-vous nous raconter comment s’est passé l’écriture de ce disque? Est-ce que ces chansons ont été écrites récemment?

    Oui, ce sont de nouveaux morceaux. (Mis à part une chanson pour laquelle j’avais déjà le riff depuis quatre ans.) J’ai terminé l’enregistrement studio en juin 2014 et j’ai ensuite fait deux titres chez moi.

    Mais la plupart des titres ont été composés sur une période de trois ans. En 2013, j’ai rencontré Noël Matteï qui a écrit quasi la totalité des textes. On s’est rencontré sur des réseaux sociaux et on a beaucoup discuté. Chacun connaissait le parcours de l’autre. Lui est chanteur et romancier. Moi, j’étais en attente de textes car j’avais fais un album déjà en 2004. C’était un album instrumental électronique que je n’ai pas sorti. Je suis quelqu’un d’assez cérébral. Et, en prenant du recul, je me suis aperçu que je n’allais pas vraiment assumer ce disque. Je préférais faire de la pop-rock avec un peu d’électro mais en ayant une mélodie avec des textes à balancer et faire passer certains messages.

    Et donc on est devenus amis et on a fini par avoir la même vision des choses. On fait de la musique pour le plaisir en le faisant bien et en allant au bout des choses en peaufinant les détails de la production. (Ce sont parfois des choses que le commun des mortels ne remarquerait pas et qui ont, pourtant, une grande importance sur le résultat final)

    On a donc parlé de l’orientation des textes. Je voulais quelque chose qui parle de la pudeur, des secrets, de l’amour et de certains messages écologiques. Il y a aussi un texte qui parle de balades à moto le long des falaises. Je trouve qu’il a su capter le truc et trouver les mots justes pour retranscrire ces sensations.

    C’est un travail qui a duré un an pendant lequel il est venu bosser chez moi. Puis, on a enregistré des démos. Et un an plus tard, j’enregistrais le tout en studio.

    Cela s’est passé sans pression car, à l’époque, je n’avais pas encore signé chez un label. J’ai enregistré chez Rec N’ Roll, en Belgique avec Charles De Schutter (qui a collaboré avec M, No One Is Innocent et bien d’autres).

    J’ai aimé collaborer avec lui et son équipe parce qu’ayant fait des études d’ingénieur du son avant Indochine, je suis quelque de très pointilleux sur le son. Ici, je voulais un son « garage » produit. Donc, je voulais que ça sonne un peu « cra-cra » tout en restant assez propres avec des boîtes à rythme.

    Ensuite, Mat, mon manager (qui est belge aussi) nous a rejoint. Il avait entendu le morceau Underground et croyait en mon projet.

    Domcd

    Il est vrai qu’il fallait y croire en ce projet car, après la période Indochine, vous vous êtes mis fort en arrière-plan médiatiquement.

    Oui, mais c’était voulu. Déjà dans Indochine, je ne me mettais pas en avant. J’ai formé le groupe avec Nicolas. Dimitri et Stéphane nous ont rejoint après. Je suis resté jusqu’en 1994 juste avant l’album Wax. Après 14 années dans Indochine, il y a eu l’usure du temps qui a fait qu’on s’est moins bien entendu. Y avait pas de problème légal, car chacun avait sa place. Mais, on a fini par se disputer, Nicolas et moi. Alors, la faute à qui? Je pense que c’est un peu 50/50. J’ai donc claqué la porte et je me suis mis au vert. J’ai pas fait de musique pendant un an. Mais cela a fini par me manquer. J’ai donc recommencé à jouer mais pas dans l’optique de faire un album ou me faire signer (ce qui aurait été plus facile à l’époque).

    Après, quand l’album Paradise est sorti, et que Indochine a pu renaître, j’aurais pu profiter de la vague. Mais j’ai préféré rester dans mon monde en faisant des documentaires. J’ai fait le tour du monde. Je suis allé en Chine, en Islande, aux Caraïbes,… C’était des voyages avec mon sac à dos, pas des arnaques pour touristes où on achète des bibelots. (Rires)

    J’ai développé une passion pour la pêche à la mouche qui m’a permis de développer un rapport à la nature. L’écologie a toujours été quelque chose d’important pour moi. Mes grands-parents étaient paysans et donc, j’ai toujours accordé une grande importance au respect de la nature. (Ne jamais jeter quelque chose par terre par exemple,…)

    Grâce à la pêche à la mouche, j’ai appris beaucoup de choses. (notamment en entomologie)

    Par exemple, je peux savoir si une rivière est polluée ou non simplement en retournant un galet et voir s’il y a ou non des larves de plécoptères.

    Pour illustrer une journée typique pendant les 20 ans qui ont suivis Indo, je partais le matin au fin fond de la Corrèze pour observer des sangliers ou des renards. Pêcher, puis, relâcher le poisson sans l’abîmer. (Je suis devenu un peu comme le maître de karaté qui ne porte pas le coup fatal) (rires)

    Après ça, je m’étendais dans l’herbe pour observer le ciel. Puis, je repartais en écoutant du Blur à fond dans la voiture. (Rires)

    Vous profitiez de la vie, en somme.

    Oui. Et puis à côté de cela, j’ai une vie de famille et j’essaie d’être présent un maximum pour mes enfants.

    Et donc, quand on observe des gens de mon âge à 56 ans, ils préparent leur retraite en se disant « je vais faire ceci, cela ». Moi, j’ai fait tout pendant que j’étais en forme pour le faire. Et aujourd’hui, alors que je ne devrais plus faire de musique, je repars sur un album.

    Alors, on peut se demander « Pourquoi ? ».

    Il y a plusieurs facteurs à cela. J’aime la musique, l’envie était là. Je sais que le métier est devenu difficile mais je n’avais pas la pression de résultat. La seule pression que je me suis mise, c’est de faire un album que j’allais assumer et que mes amis musiciens en disent du bien.

    C’est une belle récompense pour moi. Après, pour ce qui est des ventes, c’est quelque chose d’accessoire, je pense.

    J’ai voulu faire la musique que j’aime faire, sans calcul, avec ce côté « pop » qui ressort. Je pense que si j’en refais un, il sera un peu plus hard. J’ai dû digérer pas mal de choses, me mettre au chant (chose que je n’avais jamais fait.)

    En effet, vous avez une voix un peu dans le style d’Etienne Daho.

    Oui, on me le fait souvent remarquer. Et puis, on est un peu de la même génération. On écoutait certainement les mêmes groupes (Kraftwerk, Depeche Mode,…) et donc, on retrouve des influences similaires dans nos chansons.

    Au sujet de l’inspiration, pour ces chansons, dans quel ordre faisiez-vous les choses?

    Je faisais d’abord la musique. Ensuite, les textes venaient. Généralement, j’enregistre les chansons « guitare-voix », puis je mets la production tout de suite après. Ce qui fait que mes maquettes sonnent tout de suite comme le résultat final. Après, je peaufine les détails mais en général, je ne suis pas loin de la vérité. Il y a juste eu pour Instagram où j’avais une mélodie de départ assez joyeuse. Mais en lisant le texte, j’ai décidé de prendre une autre direction et de refaire quelque chose de plus posé avec des arrangements de cordes, etc..

    Je trouvais que cela donnait plus de puissance au texte. Je voulais faire quelque chose de différent et montrer que je savais aussi faire ce genre de chanson. Et puis j’avais une idée précise de ce que je voulais faire. Je voulais commencer par Ici et terminer par Instagram.

    Vous aviez donc une idée assez précise de ce que vous souhaitiez au départ et de l’ordre précis des chansons. Aujourd’hui,  on dirait que certains ont un peu perdu ce plaisir d’écouter un album du début à la fin.

    Oui, moi j’aime acheter le disque en physique, regarder les crédits, le visuel tout en l’écoutant. Pour cet album, j’ai insisté pour qu’il sorte en vinyle et les gens du label (Verycords) ont été très compréhensifs. J’avais été voir auparavant sur de gros labels et on m’avait fait comprendre que les règles ne seraient pas les mêmes, qu’il faudrait retoucher la production pour la radio. Et je ne pouvais pas les laisser faire. Parce que je ne fais pas cela dans ce but. Je n’ai pas l’inspecteur des impôts qui va me tomber dessus. Je vis normalement, j’élève ma famille,…

    J’ai juste eu le luxe de payer le studio mais sans même savoir si j’allais être signé. Et tant pis si ce n’était pas le cas.

    Était-ce difficile de trouver un label?

    Oui, ce fut un choc pour moi. J’étais toujours resté au courant de l’actualité musicale. Mais je n’avais pas vu l’évolution du métier. J’avais des potes musicos qui avaient abandonné alors que moi, j’avais connu l’âge d’or dans les années 80.

    A l’époque, on faisait quelques maquettes que l’on donnait à la maison de disque et trois semaines après on était signés. Ensuite, on faisait un album, puis une tournée. C’était cool, on va dire.

    Aujourd’hui, il faut d’abord faire un développement sur internet (parfois trois ans!) pour espérer te faire signer. On a sorti Underground six mois avant de se faire signer chez Verycords.

    La beauté de l’idée est un disque très varié en tout cas, avec des titres qui rappelle Indochine et d’autres plus modernes et électro.

    Oui, mais en réalité, les chansons qui à l’époque « sonnaient » Indochine, c’était moi qui les composais. Alors, on retrouve un peu de ça, mais je ne voulais pas faire un disque entièrement comme ça. J’ai fait ce que j’aimais en apportant mon son. Et je suis content, au final, de ce que j’ai fait. Je n’ai pas de pression de vente. Je me suis fait plaisir avec des gens qui étaient adorables dont certains sont devenus des amis. J’ai impliqué Charles un maximum. Et il a su donner ce son « rock garage » produit que je recherchais.

    Il a su me mettre à l’aise quand j’ai dû chanter. Heureusement, comme je suis musicien, je chante assez juste. On a ajouté un peu de vocodeur mais ce n’était pas pour cacher la misère.

    Y a des productions où on essaie de maquiller les défauts avec le Pro-Tool à un point qu’il ne reste que les effets. Or, ces effets doivent juste mettre en avant la production. Mais au départ, il faut que ce qui se trouve sur la bande soit de qualité. C’est comme en photo, on ne fera jamais une beauté avec une femme cyclope.

    À propos de femme, on retrouve une voix féminine sur certaines chansons.

    Oui, c’est ma fille qui a chanté sur Le soleil est comme toi et sur A ne pas croire (dont elle a fait le texte également).

    On a fait ce duo chez moi et on l’a gardé tel quel sur le disque.

    Est-ce que vous envisagez une tournée ?

    Oui, à l’automne. Je prévois de faire des clubs. C’est ce que je préfère. D’ailleurs, les meilleurs souvenirs que j’ai avec Indo, c’est quand on jouait dans des petits clubs au début.

    Y a moins de confort sur scène, mais le partage est là. Maintenant, il faut que je me prépare à chanter devant tout le monde, etc.. J’ai pris des musiciens qui sont un peu dans mon état d’esprit et donc ça va être une belle expérience.

    Retrouvez la chronique de l’album de Dominik Nicolas en cliquant ici.

    Christophe Pauly
    Christophe Pauly
    Journaliste et photographe du Suricate Magazine

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