auteur : José Eduardo Agualusa
édition : Métailié
sortie : avril 2017
genre : roman historique
La reine Ginga et comment les Africains ont inventé le monde relate la vie de Fransisco José, jeune prêtre brésilien métis, choisi par la reine Ginga pour devenir son secrétaire personnel. Sa connaissance du portugais lui permettant de communiquer avec les envahisseurs dont c’est la langue, il se révèle est un atout non négligeable. Encore jeune et pétri des idéaux chrétiens, Fransisco subit un choc culturel qui petit à petit, fera voler toutes ses croyances et autres idées reçues, en éclats.
Lorsqu’il débarque à Luanda, la reine Ginga, fille et sœur de roi, a éliminé son frère pour prendre sa place sur le trône. Dotée d’un caractère fort et assuré, d’une intelligence redoutable qui perce comme des étincelles de ses yeux sombres, aussi impressionnante que cruelle, elle louvoie entre ses deux adversaires les hollandais et les portugais qui se disputent un territoire qui ne leur appartient même pas dans le but d’en pomper les richesses. Pour garder le contrôle de son royaume qui couvre une partie de l’Angola, elle ira jusqu’à se faire baptiser et portera dès lors le nom d’Ana de Sousa
Au service de la reine durant de nombreuses années, Fransisco José sera envoyé en mission au péril de sa vie et connaîtra un destin hors du commun, fait de découvertes, de répugnance liée à l’incompréhension quelquefois, d’acceptation s’achevant par le respect d’un monde méconnu où se côtoient richesses et barbarie.
La reine Ginga est un roman historique sympa et bien ficelé, emmené par la prose de José Eduardo Agualusa, écrivain angolais reconnu, qui nous détaille avec application, objectivité et un brin d’humour, les mœurs et autres traditions qui gouvernent les croyances africaines. C’est un récit qui nous propulse dans un monde hostile, où le colonialisme tente de s’implanter avide du pouvoir qu’apporterait le vol des richesses de l’Afrique tout en réduisant sa population à l’esclavage prenant comme raison d’obscurs motifs religieux. Il met ainsi en exergue un moment-charnière de l’Histoire africaine à travers le personnage de Ginga, reine et femme ambitieuse tout à la fois qui, subissant de plein fouet l’invasion de son territoire et la volonté des colons de se l’approprier, fait certes, preuve de cruauté, mais révèle aussi une intelligence pénétrante au service de la protection et de l’unité de son royaume en le conjuguant avec les croyances tant de son pays que des envahisseurs, composant avec les uns et les autres sans perdre sa dignité.
Crainte et respectée, la reine Ginga mériterait une plus grande reconnaissance tant elle mérite de figurer en bonne place dans le panthéon des grandes dames qui ont façonné l’Histoire.