auteur : Vincent Perriot
éditions : Dargaud
date de sortie : 22 août 2014
genre : Polar
Pacifique, l’ancien taulard solitaire et mystérieux, est de retour. A la fin du premier tome, on devinait que notre héros n’était pas loin d’être rattrapé par son passé de trafiquant de drogue, malgré son désir apparent de passer à autre chose et de se ranger…
Avec ce deuxième tome, c’est chose faite. Paci s’est rasé la tête et a quitté Bordeaux pour Calais, où il travaille entre l’Angleterre et la France pour son ancien patron, un grand ponte des stupéfiants amoureux de l’Asie du sud, Ashram. Lorsque Paci lui indique que son ex-femme, grâce à son job de serveuse sur un ferry, fait discrètement passer cocaïne et MDMA en quantité colossale dans de petits parapluies de cocktails pour le compte d’un autre magnat de la drogue, Ashram ordonne à Paci de récupérer les stocks, en épargnant son ancienne épouse.
Là-dessus, point de risque : Paci est toujours aussi classe avec les femmes. D’ailleurs, il a ramené de Bordeaux sa conquête du premier tome, il lui fait des câlins, la regarde dormir, et lui envoie des sms quand il rentre tard – on ne s’y attendait pas forcément. Mais, par ailleurs, on retrouve le Paci qu’on connaît : toujours passionné de vitesse, toujours pas très doué au niveau de l’expression des sentiments. Toutefois, on a l’impression que Perriot s’est quelque peu libéré de l’aura de son héros, qui semblait l’entraver dans le premier tome. Ou alors, c’est le retour dans le milieu interlope de la drogue qui, étrangement, rend Paci plus léger, comme plus apaisé, plus simple et plus direct. On n’est cependant pas complètement convaincu par la psychologie du personnage, qui manque de cohérence – le retour de Paci en justicier laisse quelque peu perplexe.
L’intrigue est quant à elle plus resserrée, plus linéaire que dans Bacalan : tout est structuré autour de la mission confiée par Ashram à Paci et de l’organisation du trafic. Trop concentrée sur cet objectif très factuel, elle donne globalement l’impression de piétiner : on voudrait en découvrir davantage sur la relation entre Paci et sa copine – toujours un peu paumée –, sur son passé et son histoire familiale visiblement troubles dont les énigmes sont dévoilées au compte-gouttes …L’ambiguïté du personnage, la peinture d’un double retour, à la fois dans la vie ordinaire et dans le milieu de la drogue, que laissait apercevoir le premier tome, sont insuffisamment exploités.
Il nous reste alors les plaisirs que s’offre Perriot, comme ces scènes de courses en voiture, ses croquis de jeunes marginaux, personnages secondaires à peine esquissés, peut-être prometteurs, mais dont on ignore si on les reverra. Et, surtout, le vrai plaisir qu’il offre à ses lecteurs : son goût pour les atmosphères exotiques, moites et bleutées, pour les architectures urbaines et les vastes ciels, pour les intérieurs encombrés. Ses points de vue cinématographiques et son talent pour déraciner le lecteur et dépasser le glauque des situations, en aspirant à la beauté et à la douceur, sont assurément les meilleurs atouts de Paci, mais nous les découvrions déjà dans le premier tome. En tout cas, si Perriot veut continuer à nous raconter une histoire de gangsters et de rédemption à ce rythme plutôt lent, en préservant sa tendance contemplative, tout en approfondissant la vie de son héros, il va lui falloir bien plus qu’une trilogie. Pourquoi pas ?