Nuestras Madres
de César Díaz
Drame
Avec Armando Espitia, Emma Dib, Aurelia Caal, Julio Serrano Echeverría
Sorti le 13 novembre 2019
Couronné de la Caméra d’Or (prix remis au meilleur premier film, toutes sélections confondues) lors du dernier Festival de Cannes, et succédant ainsi au Girl de Lukas Dhont, récompensé l’année précédente par le même prix, Nuestras Madres de César Díaz a peut-être entériné une forme de mainmise des productions ou coproductions belges sur ce prix en particulier, mais a surtout affirmé de manière unilatérale la capacité du film à sujet à accéder aux plus hautes places des palmarès de festivals, lesquels consacrent d’ailleurs de plus en plus de terrain à ce sous-genre bâtard du cinéma d’auteur.
Nuestras Madres raconte le Guatemala contemporain, plongé dans une série de procès contre les militaires à l’origine de la guerre civile, par le prisme de l’histoire personnelle d’Ernesto. Ce jeune anthropologue, chargé par la Fondation médico-légale d’identifier les restes des victimes de la guerre, tente simultanément de retrouver la trace de son père, guérillero disparu durant le conflit.
Le récit et sa résonnance personnelle pour son réalisateur, d’origine guatémaltèque, ont vraisemblablement poussé celui-ci à choisir, pour donner forme à son film, d’emprunter une voie médiane entre une démarche strictement fictionnelle et une autre, plus documentaire. Cette présence rassurante de la vérité documentaire ainsi que l’implication personnelle de son auteur semblent maintenant suffire à transformer un film à sujet un peu laborieux et très appliqué en un grand film d’auteur produisant un point de vue singulier sur ce qu’il raconte et ce qu’il montre.
Pourtant, le film de César Díaz souffre de gros problèmes d’équilibre entre une volonté d’en dire le moins possible, de rester constamment dans un non-dit extrêmement scénarisé et artificiel – qui nuit d’ailleurs parfois à la compréhension pure et simple de l’intrigue qu’il déroule – et des débordements inconsidérés de sentimentalité exacerbée, parfois vraiment gênants dans le cadre du projet global que semble porter le film.
Cette perte d’équilibre entre le trop et le trop peu transparait particulièrement lors de scènes a priori non-narratives mais se voulant terriblement « parlantes ». Constituées de gros plans sur des visages de femmes, victimes collatérales de la guerre civile, elles viennent ainsi souligner à gros traits la dignité face à l’horreur. Mais ce que soulignent surtout ces plans légèrement complaisants, ce sont les bonnes intentions, lesquelles deviennent ainsi ni plus ni moins que la raison d’être d’un tel film. Et, au fond, pourquoi César Díaz se priverait-il d’exhiber ainsi ces fameuses bonnes intentions, puisqu’elles semblent maintenant suffire à faire illusion et à rapporter des prix.