Autrefois considéré comme l’un des acteurs les plus prometteurs de sa génération, Nicolas Cage a enchaîné durant vingt-cinq ans les rôles dans des productions notables dont un grand nombre font aujourd’hui partie des classiques du cinéma contemporain. Pourtant, au tournant de l’année 2010, l’acteur a commencé à accepter des projets sans toujours réellement tenir compte de la qualité. Alors qu’est récemment sorti Mandy, son nouveau film en partie tourné en Belgique, revenons un instant sur la carrière d’un des comédiens les plus surprenants de notre époque…
Bref retour sur la carrière de Nicolas Cage…
Dans les années 1980, Nicolas Cage a établi sa réputation en tournant avec certains des plus grands réalisateurs de son temps : son oncle Francis Ford Coppola avec Cotton Club en 1984 et Peggy Sue s’est mariée en 1986, Alan Parker avec le somptueux Birdy en 1984, les frères Coen avec Arizona Junior en 1987, ou encore Norman Jewison la même année avec Éclair de lune.
Cette solide carrière s’est encore consolidée dans le courant des années 90 lorsque Cage est apparu dans Snake Eyes de Brian de Palma (1998), À tombeau ouvert de Martin Scorsese (1999), le bouleversant Leaving Las Vegas (Mike Figgis, 1995) qui lui valut de recevoir l’oscar du meilleur acteur, ou coup sur coup dans les blockbusters The Rock (Michael Bay, 1996), Les Ailes de l’enfer (Simon West, 1997) et Volte-Face (John Woo, 1997). Nicolas Cage était alors devenu l’un des acteurs les plus en vogue de sa génération, au point d’être envisagé pour interpréter Superman dans le projet avorté de Tim Burton, Superman Lives.
Malgré une légère baisse qualitative, l’acteur est encore apparu au tournant du XXIe siècle dans plusieurs productions notables comme la duologie Benjamin Gates, Lord of War (Andrew Niccol, 2005), Kick-Ass (Matthew Vaughn, 2011) ou le brillantissime Adaptation. de Spike Jonze (2002).
Qu’est-il arrivé à Nicolas Cage ?
Pourtant, malgré ces succès, Cage s’est rapidement illustré comme le maître du surjeu. Son étrange prestation dans le paradoxalement excellent Embrasse-moi, vampire en 1989 lui aura par exemple valu pas mal de moqueries, au point de devenir un leitmotiv sur internet.
L’acteur s’est récemment expliqué concernant ces moqueries en expliquant que : « Beaucoup de mes héros comme Edvard Munch et Stravinsky furent fortement critiqués parce qu’ils étaient différents. Ce sont des personnes qui ont brisé le moule. Parfois, lorsqu’on vous critique, vous êtes probablement en train de faire quelque chose de bon par le simple fait que vous poussez les gens à réfléchir. Ce n’est pas toujours idéal d’être aimé. Parfois, c’est bien d’être détesté parce que ça signifie que vous avez fait quelque chose qui s’est glissé sous la peau des gens ». Le surjeu de l’acteur est en réalité quelque chose de réfléchi et qui trouve son inspiration dans le cinéma d’hier ; la prestation loufoque de Cage dans Embrasse-moi, vampire est par exemple inspirée de l’expressionisme allemand et notamment du Nosferatu de Murnau.
Reste que cette étonnante approche du Septième Art aura donné naissance à quelques prestations hallucinantes et aura parfois mené l’acteur à manquer d’être éjecté des plateaux de tournage.
Dans la dynamique gentiment moqueuse expliquée plus haut, certains ont été jusqu’à inventer l’art hilarant du « Caging », consistant à transformer l’environnement de travail de quelqu’un en le recouvrant entièrement de photos de l’acteur…
Nicolas Cage est en réalité à la fois le meilleur et le pire acteur de sa génération, capable de performances puissantes et somptueuses (Birdy, Leaving Las Vegas, Adaptation., etc.) mais également d’interprétations parfois à la limite du ridicule (notamment dans le remake de Wicker Man, ou les deux Ghost Rider). Beaucoup de compilations des pires interprétations du comédien existent sur internet et l’humoriste américain Conan O’Brien a même été jusqu’à imaginer l’hilarant « Nic Cage Terror Alert System » dans lequel il prétend que le Département de la Sûreté de l’État pourrait utiliser des extraits de films de Nicolas Cage pour informer les citoyens du niveau d’alerte en cas de crise.
Quelques mauvais choix de films auront en effet doucement décrédibilisé l’acteur. Mais surtout, Cage est devenu depuis quelques années l’un des rois du Direct-to-dvd, apparaissant dans des films de piètre qualité qui passent le plus souvent inaperçus ou sont descendus d’entrée de jeu par la critique. La raison à cela est simple…
Entre 1996 et 2011, l’acteur a gagné près de 150 millions de dollars pour ses apparitions dans divers films, allant jusqu’à toucher 40 millions pour la simple année 2009. Ces importantes rentrées financières furent cependant contrebalancées par sa propension à dépenser compulsivement… Cage s’est ainsi offert le premier numéro de Superman pour la modique somme de 150 000 $ ; des os de dinosaures – dont un crâne de tarbosaure – pour 300 000 $ ; des maisons à Newport Beach (25 millions de $), Rhode Island (15,7 millions $) ou Las Vegas (8,5 millions $) ; la LaLaurie Mansion à la Nouvelle Orléans (3,4 millions $), réputée comme l’un des lieux les plus hantés des États-Unis ; le château de Schloss Neidstein en Bavière ; le château de Milford en Angleterre, dans le comté de Somerset ; une île dans les Bahamas (3 millions $) ; 30 à 50 voitures de sport ; une pieuvre domestique (150 000 $) ; des têtes de pygmées rétrécies ; une tombe pyramidale aujourd’hui connue sous le nom de « Cage Pyramid », …
Seulement voilà, en 2009, l’IRS (Internal Revenue Service, l’administration fiscale américaine) a réclamé des impayés au comédien à hauteur de 14 millions de $. À cela se sont ajoutés des déboires judiciaires avec d’anciennes conquêtes ou avec son ancien agent, Samuel Levin.
Pour rembourser l’administration fiscale, Cage a donc dû multiplier les projets cinématographiques sans plus tenir compte de la qualité de ceux-ci. Depuis quelques années, il apparaît donc dans près de cinq films par an dont, à quelques rares exceptions près, la qualité laisse bien souvent à désirer…
Mais de temps à autre, les astres s’alignent et permettent à l’acteur de laisser libre cours à sa folie dans des films qui, contre toute attente, s’avèrent réellement bons. C’est le cas de Mandy qui est sorti dans nos salles fin du mois dernier…