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    Misericordia, une ode à l’humain au Festival de Liège

    Texte et mise en scène : Emma Dante. Avec : Italia Carroccio, Manuela Lo Sicco, Leonarda Saffi, Simone Zambelli.

    Le Festival de Liège s’est clôturé avec beaucoup d’émotions : ce samedi 26 février, la salle du Manège Fonck a accueilli Misericordia, un spectacle d’Emma Dante, un conte contemporain qui n’en est pas un, une parenthèse de vie de trois femmes qui partagent une habitation insalubre et une grande misère. Pendant la journée elles tricotent la laine et, après le coucher du soleil, elles tissent le plaisir des hommes. Elles s’occupent aussi d’Arturo, un gamin handicapé, qui communique seulement par ses gestes, souvent répétés et irréfrénables. Il est le fils de Lucia, leur amie défunte, qui a accouché suite aux violences répétées d’un de ses clients, qui était aussi le père de son enfant. C’est le jour où Anna, Nuzza et Bettina disent au revoir au gamin car elles ont trouvé un lieu qui pourra l’accueillir dans des conditions plus humaines : peut-être qu’il aura une chambre pour lui, peut-être que cette chambre aura une fenêtre et que, par cette fenêtre, il pourra profiter de la lumière du soleil. C’est un jour de séparation, mais aussi les derniers instants d’une enfance partagée entre un amour maternel et une pauvreté dénigrante.

    Tout se passe dans cette pièce presque vide, et entre ces quatre êtres. Dans ce lieu qui est casa, et enfer et, malgré tout, abri. Tout se passe aussi sur ce plateau habillé seulement de quatre chaises pliables et d’un tas d’objets plus ou moins futiles. On assiste à des scènes de vie quotidienne, à l’exaspération d’une condition humaine précaire et, par moments, on arrive à en rigoler. Le jeu de Italia Carroccio, Manuela Lo Sicco, Leonarda Saffi et Simone Zambelli est magistral. Ils arrivent à restituer sur scène un supplice quotidien, dépourvu de toute rhétorique, et à traduire en langage corporel une esthétique qui oscille entre le grotesque et le sublime. Les dialectes nous ancrent dans le réel tandis que l’alphabet gestuel et la danse racontent un espoir infini.

    On pourrait parler des sujets importants et nécessaires qui ont été abordés dans la pièce, de la violence, de la maternité dans son acception la plus ample, de la maladie et du regard sur l’autre, on pourrait réfléchir à cette magie qui a permis à des mouvements paroxystiques de devenir danse ou encore à la présence de ces artistes qui nous donnent envie de mieux comprendre l’humain, mais, après tout, ce spectacle a été un véritable labyrinthe d’émotions à vivre.

    Une fois de plus, Emma Dante va droit au point et elle frappe juste. Misericordia est une perle théâtrale qui nous parle de ce qui reste, quand on n’a plus rien. Applaudissant debout, le public a partagé un sentiment profond, enveloppé dans une ambiance d’une Sicile qui n’a jamais semblé aussi proche, comme si c’était la porte d’à côté, comme si c’était tout simplement là où il y a besoin d’un regard plus conscient. On dirait que, à la fin du spectacle, le choix de son titre est apparu comme une évidence.

    Elisa De Angelis
    Elisa De Angelis
    Journaliste du Suricate Magazine

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