Misbehaviour
de Philippa Lowthorpe
Drame
Avec Keira Knightley, Jessie Buckley, Gugu Mbatha-Raw
Sortie le 30 septembre 2020
« Sexiste et ringard » s’offusquent les porte-paroles d’associations féministes quand on leur parle de l’élection de Miss France 2020. Et pourtant, malgré une audience en baisse, l’émission semble encore tout à fait rentable, attirant étonnement plus de spectateurs que ses concurrentes « The Voice » ou encore « Danse avec les stars ». On pourrait penser qu’il faut laisser le temps au temps et que, secoué par le mouvement #Metoo et l’affaire Weinstein, le monde de l’audiovisuel ne semble commencer à se réveiller que maintenant d’un long sommeil patriarcal.
Mais comme le prouve l’élection chahutée de Miss Monde 1970, ces débats ne sont pas si neufs. Et c’est justement dans cet événement vieux de cinquante ans que nous plonge Misbehaviour en retraçant le parcours de ces femmes qui ont décidé pour des raisons féministes de semer la zizanie sur le plateau de l’émission. En parallèle, la réalisatrice profite du fait que Miss Monde 1970 soit aussi marqué par la prise de conscience du caractère très blanc d’un tel concours, pour surfer sur un autre sujet non pas moins d’actualité, les discriminations raciales. Bien sûr, il y a une confrontation entre les deux idéaux. Keira Knightley en militante féministe qui lutte contre la diffusion de cette émission à l’époque encore plus « ringarde et sexiste » se heurte à la volonté qu’a Jennifer Hosten, concurrente grenadine interprétée par Gugu Mbatha-Raw, de voir une femme non-blanche et élue Miss Monde redonner espoir à toutes les petites filles de couleur.
Et si le casting est maîtrisé, les relations entre les personnages le sont aussi. Il n’y a pas de jugement de valeur. Misbehaviour évite le cliché des hippies révoltées qui ne se rasent pas sous les bras et qui s’opposent dans un combat moral à l’objectivation de miss bêtes et superficielles. En fait, ce sont toutes des femmes très différentes, au parcours multiple, et qui avancent dans la vie en pensant faire ce qu’elles semblent le plus approprié. Mais l’écriture des personnages reste, quant à elle, assez attendue. On y retrouve Knightley l’intellectuelle un peu coincée, sa mère la femme au foyer bourgeoise, les artistes rebelles, le présentateur lourd et infidèle, les miss qui ont du charme mais aussi du caractère et une bimbo superficielle dans le tas parce qu’il en faut bien une.
En fait de manière générale, Misbehaviour prend assez peu de risques. Les dialogues peinent à décoller tout comme la musique qui varie, comme on peut s’y attendre dans ce genre de film, entre du classique pour montrer le caractère guindé du concours et des moments rock qui appuient le côté rebelle des groupes féministes. Misbehaviour est d’ailleurs aussi très linéaire dans sa narration. Si ce n’est le look du film un peu vintage, il n’y a pas vraiment de parti pris esthétique. On passe un bon moment mais, puisque des films comme celui-ci se multiplient sur nos écrans – des comédies un peu engagées parce que se basant sur des faits historiques qui font écho à l’agenda médiatique d’aujourd’hui – on est en droit d’en attendre un peu plus que du divertissement et de l’information.
Et au même titre que Lowthorpe ne prend pas de risque esthétique, elle n’en prend pas non plus sur le plan éthique. Misbehaviour est une production féministe consensuelle qui ne se fatigue pas à créer le débat et ne montre du sexisme que les maux qu’on lui reconnaît aujourd’hui le plus souvent – les inégalités salariales, la valorisation de la parfaite épouse et mère de famille, la proportion élevée d’hommes dans les postes à responsabilités et plus généralement le regard porté sur les femmes. En somme, c’est un film qui parle de révolutionnaires sans l’être.