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    Michel à la Samaritaine

    Ecriture et mise en scène de Céline Scoyer avec Séverine De Witte, Thomas Demarez, Pierre Nisse et Michaël Manconi

    Du 16 au 27 décembre 2014 à 20h30 au café-théâtre La Samaritaine

    Michel, comme un grand chanteur français qui, en chantant la maladie d’amour aux lacs du Connemara, rêve d’être une femme.
    Michel, comme un poisson rouge dans un bocal qui garde les secrets de quatre colocataires jusqu’à en mourir.
    Michel, comme toi, moi et tous les spectateurs assis dans ce café-théâtre qui assistent à des expériences trentenaires.
    Michel, comme une pièce, des rencontres, de l’humour et surtout un moment plaisant.

    Simon, Hervé et Isabelle – ou Isa si vous préférez la tutoyer, elle aimerait bien – parcourent une liste de noms afin de choisir un quatrième colocataire. Avec un retard de huit minutes, se présente Pierre finalement accepté par la majorité : l’indifférence d’Hervé et l’excitation d’Isa prennent le dessus sur le trouble obsessionnel compulsif de Simon. Commencent alors à se dévoiler ainsi qu’à se développer les relations entre les différents personnages entre les dits et les non-dits.

    Simon est un futur urologue qui ne connaît comme amis que ses livres de médecine. Pris par son obsession de tout contrôler, il fait signer aux autres un contrat de règlement intérieur dont les clauses, entendons-nous, dépassent les limites du possible et du supportable. Vulgaire mais gentille, Isa correspond à ce type d’enseignante qui cherche de l’attention partout. Elle passe son temps libre à causer ou à se taper des hommes auxquels elle prépare des speeculoos faits-maison. Hervé est plus simple à résumer : un artiste au chômage qui a besoin d’un seul pantalon mais de beaucoup de bière et dont l’activité préférée est de ne rien faire. Pierre qui vient de quitter Frédéric tombe amoureux de Hervé. Il fuit Isa qui, folle de lui, cherche à le séduire et refuse de comprendre qu’il préfère les hommes. On signale aussi la douce présence de quelques personnages qui ne se manifestent pas sous la forme d’acteurs : Michel Sardou qui accompagne le spectacle en images sur les murs, en chansons sur les CDs et en concert ; le poisson rouge qui tient son nom de leur idole ; la voisine polonaise qu’on écoute recevoir ses clients la nuit ; et finalement ce Jean, mystérieux ancien colocataire dont on refuse de parler.

    Le choix de Céline Scoyer de construire des personnages typés répond parfaitement à ce genre de comédie et permet surtout au spectateur d’assimiler en quelques minutes leurs caractérisations bien définies. Ce dernier s’attend alors le long du spectacle à recevoir des acteurs un jeu qui correspond aux traits spécifiques qu’il s’est construit et il se trouve par la suite satisfait et même surpris par certains gestes et certaines répliques. C’est la base de toute comédie : poser des types, créer des attentes, les satisfaire puis surprendre. L’humour nait aussi de l’extrême contraste entre les différents personnages qui permet des situations conflictuelles et gère l’équilibre entre la mise en scène et le dialogue : le dynamisme d’Isa et la loquacité de Simon compensent l’immobilité et le silence d’Hervé …

    L’espace scénique et les accessoires se réduisent à l’idée d’un minimalisme essentiel au jeu: une table avec quatre chaises et un fauteuil pour s’asseoir et entre lesquels se limite majoritairement l’espace du jeu, un bocal pour le poisson, une radio pour écouter Sardou et quelques posters de lui, un tableau pour rappeler à Hervé de ranger ses affaires et enfin une balle de tennis pour organiser les cercles de paroles. S’ajoute à cet espace ce qu’on peut appeler le « non-espace » ou l’étendu de l’espace visible : une cuisine et les chambres dans lesquelles les personnages disparaissent. L’accès à ces pièces est donné par une porte et un escalier qu’on visualise sur scène, permettant au spectateur d’imaginer ce qui s’y déroule quand les personnages y rentrent.

    Michel parvient ainsi à créer, entre les murs d’un seul espace, le quotidien des quatre personnages en succédant des petits-déjeuners, des diners, un anniversaire et des cercles de paroles. Aux beaux moments qui touchent l’amour et à d’autres qui frôlent l’amitié – puisque Simon avait bien précisé dans le contrat qu’il ne s’agit pas d’amitié – s’opposent des moments d’engueulade et de tension, ne laissant de l’espace qu’à la solitude. Les mensonges qu’ils se cachent et que découvre graduellement le spectateur avec certains personnages engendrent un inversement de la situation et mettent fin un peu plus loin à la pièce.

    Etant de ces spectacles qui répondent aux demandes du genre et aux attentes d’un public bien précis, on ne peut rien reprocher à Michel qui offre un moment plaisant à partager entre amis ou en famille dans un « café-théâtre ». A conseiller pour les amateurs du genre.

    3/5

    Patrick Tass
    Patrick Tass
    Journaliste du Suricate Magazine

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