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    Je mens, tu mens! au Théâtre des Martyrs

    De Susann Heenen-Wolff et la Compagnie Biloxi 48, mise en scène et scénographie Christine Delmotte, avec Quentin Minon, Mathilde Rault, Fabrice Rodriguez et Stéphanie Van Vyve.

    Du 5 novembre au 6 décembre à 20h15 au Théâtre des Martyrs

    Je mens, tu mens!, c’est un peu l’histoire de soirées pas vraiment ordinaires vues à la hauteur du sexe féminin. Après quelques préliminaires se déroulant dans la chambre d’un couple de la presque quarantaine où les rapports amoureux sont mimés en ombres chinoises, la pièce de Susann Heenen-Wolff prend les allures trompeuses d’un vaudeville.

    Philippe et Charlotte ont invité un jeune couple d’amis à jouer au bridge. Au fil de la soirée, autour de bons vins, les langues se délient. Commencent alors des jeux plus dangereux. Des premiers amours aux aléas de l’orgasme féminin en passant par les mensonges autour de la sexualité, le quadrille libère peu à peu la parole autour de la jouissance féminine et finit par désavouer la performance sexuelle. Les femmes, surtout, taillent en pièces quelques clichés éprouvés, usés jusqu’à la trame par la presse féminine qui n’en finit pas d’imposer ses dictats en matière de sexualité et de normes. A coup de prescriptions sexuelles déclinées en modes d’emploi, elle n’a de cesse de vanter un eldorado orgasmique à la portée de toutes comme vecteur d’équilibre et d’épanouissement.

    Naviguant à contre-courant de ce prêt à penser dans l’air du temps, le quatuor démonte, avec un humour typiquement anglo-saxon, les stéréotypes de la soi-disant libération sexuelle. Psychanalyste de métier, l’auteure de la pièce, Susann Heenen-Wolff, a côtoyé l’intime de la sexualité des individus au-delà des contraintes sociales. Partant de son expérience, elle dit haut et fort quelques vérités qui dérangent et fait valser certains préjugés sur la chose, à grands renforts de citations de Freud et de Lacan, le tout pour consolider sa pensée. Son écriture, à la fois humoristique et pédagogique, ne verse jamais dans la vulgarité et apporte nuances et réflexions au propos même si on peut lui reprocher, de temps à autre, un brin de didactisme.

    La mise en scène, simple et originale, doit sa réussite à Christine Delmotte qui a construit le spectacle comme un scénario de film à regarder, avec un générique final et une sortie de spectateurs. Ce procédé de mise en abîme ingénieux invite chacun, voire chaque couple, à s’interroger et à se positionner sur ce qu’il a vu. Femmes, on vous prévient, si vous assistez à la pièce en compagnie de votre cher et tendre, vous n’éviterez pas quelques questions sensibles à la sortie de la salle! Les décors musicaux, quant à eux, collent bien au thème. Ils font entrer Gainsbourg, Brecht et Brassens dans la danse et travaillent irrésistiblement les comédiens au corps.

    Avec un naturel déconcertant, les duos féminins (Mathilde Rault et Stéphanie Van Vyve) et masculins (Quentin Minon et Fabrice Rodriguez) ne sont pas sans rappeler certains personnages de Woody Allen à l’esprit délié et au comique verbal. C’est indéniable, les comédiens de la compagnie Biloxi 48 apportent une très belle énergie : ils sont drôles, touchants et graves à la fois.

    Fort du succès de l’année précédente, Je mens, tu mens! est un spectacle jouissif qui revient au Théâtre de la place des Martyrs jusqu’au 6 décembre. Si vous souhaitez prolonger la réflexion et alimenter le débat sur cette pièce aux 50 nuances de gris, une rencontre avec l’auteure et la metteuse en scène se tiendra le 11 novembre à l’issue de la représentation. Une belle façon de célébrer l’armistice et de déposer les armes mais seulement après avoir déblayé le terrain miné de faux-semblants autour de la sexualité féminine.

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