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    [ANIMA 2025] Mémoires d’un escargot, Adam Elliot et la mélancolie du gastéropode

    Après quinze ans d’absence, le quinquagénaire le plus patient d’Australie fait son grand retour avec Mémoires d’un escargot (Memoir of a snail). Un second long-métrage qui promet d’être à l’image de son aîné, Mary et Max, un spécimen de méticulosité et d’intelligence.

    Adam Elliot a ses fétiches. On lui retrouve un amour pour les escargots, les relations épistolaires, les collections de figurines et le thé qui fait chavirer. Mais aussi, une loyauté envers le personnage d’Harvie Krumpet avec lequel il a obtenu un prix et qui, depuis, fait une apparition dans chacun de ses films. Et puis, surtout, on lui reconnaît une affection pour l’hyperphagie, la cleptomanie, l’alcoolisme, l’aliénation par le travail et la solitude. Pour ceux qui auraient pu espérer que le réalisateur mettrait son talent au profit d’une œuvre un peu plus joyeuse, il n’en est rien. Grace Pudell n’a pas les yeux gadouille et une tache de vin sur le front, mais un bec-de-lièvre qu’elle rêve de faire opérer. Pour la défendre contre les autres enfants qui moquent son physique ingrat, Grace peut compter sur son frère jumeau. Ils n’ont pas d’amis, mais ils ne sont jamais seuls. Ils n’ont pas d’argent, mais ils reçoivent ce qu’il faut d’amour. N’est-ce pas, d’ailleurs, un peu ce qui fait la beauté du cinéma d’Adam Elliot ; sa capacité à sublimer les situations les plus désespérées ?

    Mais à la mort de Percy Pudell, un ancien cracheur de feu et animateur qui s’est mis à boire après qu’un ivrogne lui ait ôté l’usage de ses jambes, les jumeaux se retrouvent seuls. Pris en charge par l’état, ils sont envoyés dans deux familles d’accueil différentes. Avec un couple échangiste, adepte du développement personnel, Grace s’en tire relativement bien. Gilbert n’a pas cette chance. Il atterrit dans une famille mormone, aux manières austères et au code de conduite militaire. Pour combler la solitude, Grace se rapproche de Pinky, une vieille danseuse de cabaret hyperactive et dont les relations amoureuses donnent lieu à un caméo de Nick Cave. Et surtout elle trouve refuge dans la nourriture et plus particulièrement dans les burritos de Soulvaki King sur Bruntswick street, où, pour la petite histoire, Adam Elliot a réalisé un de ses premiers courts-métrages.

    Après une gestation de quinze ans, Adam Elliot accouche d’une créature déconcertante. Quinze ans, c’est long. Mais Mémoires d’un escargot est un travail de fourmi. Le stop motion, ou plus précisément la clayography, comme il appelle sa pratique d’animation façonnée dans l’argile, est une maîtresse exigeante. Chaque accessoire, chaque mimique, chaque décor est modelé dans la glaise. Le tout est ensuite filmé au rythme interminable de 24 images par seconde. Son œuvre est à la fois une épreuve d’endurance et l’expression d’une grande sensibilité. La signature du réalisateur melbournien, c’est sa dextérité dans le registre du tragi-comique. L’ironie avec laquelle il traite le drame dans ses films – et du drame, il y en a ! – apporte de la lumière à un monde bouchée d’horreur, couleurs de boue.

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    Mémoires d'un escargotRéalisateur : Adam ElliotGenre : Animation, DrameNationalité : AustralieDate de sortie : 12 mars 2025Présenté dans le cadre du Festival Anima 2025 Après quinze ans d’absence, le quinquagénaire le plus patient d’Australie fait son grand retour avec Mémoires d'un escargot (Memoir of a...[ANIMA 2025] Mémoires d'un escargot, Adam Elliot et la mélancolie du gastéropode