À mon âge je me cache encore pour fumer
de Rayhana Obermeyer
Drame
Avec Hiam Abbass, Fadila Belkebla, Nadia Kaci
Présenté lors du Festival du Cinéma Méditerranéen 2017
Enfermée à huis clos dans un des plus beaux hammams de l’empire grec, une assemblée de femmes chante la vie à travers la condition de leur sexe. Dans une ambiance moite et dénudée, ce petit microcosme de la société féminine maghrébine se laisse aller aux vices et plaisirs à l’abri de l’extérieur, monde opprimant incarné par la figure masculine qui se révélera meurtrière.
Adapté de la pièce de théâtre du même nom, le texte de Rayhana Obermeyer porte en lui de profondes valeurs engagées qu’elle enrobe tendrement d’humour. Les mimiques et gestuelles participent à cette tonalité. Pour autant, de cette théâtralité, le jeu n’en sort finalement pas vraiment. Comme au bord de la crise de nerfs, l’hystérie féminine se donne dans la sensualité. Une combinaison dont la femme derrière le quatrième mur s’est déjà émancipée depuis la modernité ; aussi belle que soit sa folie.
Petite, grande, maigre, ronde, jeune ou vieille ; chacune de ces femmes a son histoire à faire voyager, un pan de la société à représenter. Huit femmes orchestrées par le commandant et maître à bord, Fatima, interprétée par Hiam Abbass. Nous l’avions déjà rencontrée, également à huis clos, dans InSyriated, réalisé par Philippe Van Leeuw. Elle y jouait le rôle de la femme forte, sorte de pilier contre la tempête qu’elle incarnait à merveille. Et là encore, malgré la direction, le rôle semble écrit pour elle. A la fois dur et bien aimant, le hammam n’est pas seulement une mise en abyme de Fatima, il est également son prolongement.
Aspergée d’essence et mise à feu avec une cigarette à Paris alors qu’elle se rendait sur les planches pour y jouer sa pièce, Rayhana Obermeyer n’a mis qu’un an pour se relever et aujourd’hui, A mon âge je me cache encore pour fumer est un film produit par nul autre que Les films du losange, qui vient de remporter le Grand Prix du jury au Festival Cinéma Méditerranéen de Bruxelles. A mon âge je me cache encore pour fumer n’est pas seulement un joli titre, il « résume l’absurdité de l’interdiction faite aux femmes ». La liberté et la légèreté avec lesquelles sont exprimés des thèmes aussi symptomatiques tels que, la guerre, la religion, la sexualité ou même l’amour, poursuivent une quête de changement. Et même si cela n’est pas pour plaire à tout le monde, Rayhana, à notre image, a prouvé que rien ne pourrait l’arrêter.