Titre : Martin John
Autrice : Anakana Schofield
Editions : Actes Sud
Collection : Lettres anglo-américaines
Date de parution : 5 février 2020
Genre : Roman psychologique
Martin John a commis des erreurs. Lesquelles ? quelles sont ces erreurs, quels crimes a-t-il commis ? les a-t-il seulement commis, ou est-ce son imagination ? Agressions sexuelles, attouchements, attentats à la pudeur… qu’a-t-il fait à cette femme lettonne (ou estonienne, ou lituanienne, il ne sait plus). Il ne se souvient de rien, se pose des questions.
Dès le début du livre, on est perdu. Le lecteur est directement plongé dans une situation qu’il ne comprend pas, dans suite de phrases et de pensées confuses. Puis, au fil du texte et au compte-gouttes, des informations sur Martin John nous sont données et on se reconstruit petit à petit le cours des événements.
Martin John vivait alors en Irlande avec sa mère, qu’il appelle Mam. Il a fait quelque chose qu’il n’aurait pas du dans la salle d’attente du dentiste, mais ne s’en souvient pas. Pour le protéger, sa mère l’envoie à Londres avec des règles à respecter : ne pas prendre le métro, trouver un travail, appeler régulièrement et rendre visite à sa tante le mercredi. Si Martin John est occupé, il restera tranquille et on ne viendra pas le chercher.
Martin John a des manies étranges. Il collectionne les journaux, connait par cœur les horaires de trains, l’Eurovision le fascine, les mots commençant par P l’insupportent. Tout est matière à gamberge, des broutilles l’obsèdent, tout doit être logique, trié, compartimenté…
Il n’aime pas les Fouineurs qui ne le laissent jamais tranquille. Les Fouineurs le surveillent et le dénoncent à la police. Tout le monde est suspect et sournois et lui en veut. C’est son colocataire, Conscience chauve, qui est responsable de sa situation. Et sa mère… elle aussi, peut-être…
Elle parle beaucoup, Mam. Mam ordonne, exige, questionne : « Va travailler, couche-toi de bonne heure et il ne t’arrivera rien. Ne met pas cet équilibre en danger maintenant. Surtout pas. Et va voir Noanie tous les mercredis. Un jour (…) elle lui rappellera qu’il aurait dû l’écouter pendant toutes ces années (…) en répétant je te l’ai bien dit. Je ne peux rien faire. Je ne peux plus te sauver maintenant. C’est fini pour toi. »
Le récit est entrecoupé de retours en arrière, d’interrogations insistantes, de coqs-à-l’âne, il y a des redites, des redondances, des répétitions… On évolue dans une atmosphère déconcertante, avec des bancs occupés, des jambes de femmes, des petites culottes, des zizis, des stations de métro, des hésitations, des chaises où on vous attache et des télés d’hôpital.
C’est une écriture obscure et une lecture déroutante, qui suit un flot de pensées confuses et torrentielles. On a l’impression d’être dans la tête de Martin John, voire parfois dans celle de Mam.
Une expérience étonnante.