Mange tes morts, tu ne diras point
de Jean-Charles Hue
Drame
Avec Jason François, Michaël Dauber, Frédéric Dorkel, Moïse Dorkel, Philippe Martin
Sorti le 22 avril 2015
C’est en France, chez les Yéniches, une communauté des gens du voyage, que Jason Dorkel a grandi. À tout juste 18 ans et lorsqu’il s’apprête à se faire baptiser, son demi frère revient de 15 ans de prison. Le retour en héros de ce frère qu’il admire tant fait perdre de vue à Jason les raisons de son engagement imminent pour le christianisme. Lorsque le troisième frère rejoint l’équation, la fratrie s’embarque dans le projet du vol d’une cargaison de cuivre…
Mange tes morts est un film qui tient la promesse de son titre. Cette œuvre est la continuité du premier long métrage du réalisateur Jean-Charles Hue, La BM du seigneur. Il met pour une seconde fois à l’écran l’authentique famille Dorkel, où chacun se ballade entre réelle composition et interprétation pure de leurs propres personnages.
Désarçonnés. C’est ce que nous sommes pendant les premiers instants de ce film, où le questionnement laisse place à la surprise pour enfin nous aspirer de façon tellement brutale, tellement peu cérébrale, que l’on abandonne toutes tergiversations pour se laisser envahir par l’histoire.
Au delà de l’aspect découverte du monde des gadjos, Mange tes morts est la révolution du docu/fiction. Hue parvient à exécuter la prouesse d’une réalisation brillante, technique et explosive façon western, tout en s’effaçant au point de nous noyer dans l’intimité la plus crue des personnages et de leur histoire. La générosité avec laquelle ces acteurs de leurs propres vies se jettent dans leurs émotions est bouleversante.
C’est avec le christianisme en toile de fond que le thème prend toute sa saveur. Ni bien, ni mal. Simplement des faits, des existences. Des gens de qui nous partageons le même plan astral mais dont nous ne connaissons rien. Qu’ils nous touchent ou nous écœurent, Jean-Charles Hue ne nous laisse pas la place pour un avis, un jugement ; et c’est tant mieux. Dans un monde où l’apprentissage ne se fait que par le manichéisme, Mange tes morts fait voler toutes ces notions en éclat sans pour autant en avoir la prétention.