auteur : David von Grafenberg
édition : Héloïse d’Ormesson
sortie : mars 2018
genre : roman
Un début tristement classique : Anne, quarantenaire et mère de deux enfants se fait larguer par son mari pour une autre, bien plus jeune. Sans compter que la pauvre créature se voit affublée d’un entourage qui estime qu’elle l’aurait un peu cherché du fait de son caractère mou et indolent. Et pourtant, dans cette période chaotique, quelque chose se réveille en elle ; pour la première fois de son existence, Anne prend le taureau par les cornes. Elle décide de quitter Paris et de s’installer à l’étranger. C’est en Toscane que sa deuxième vie commence et qu’elle prend enfin la vie du bon côté en profitant de sa liberté retrouvée et de sa capacité à aller vers les autres, sans cette peur tenace d’être jugée.
Quand elle fait la connaissance d’une voisine, Alessandra, une jeune femme libérée, un autre pan de sa vie va être bouleversé. Cette dernière persuade Anne que son épanouissement doit également passer par une redécouverte de sa vie sexuelle, en berne depuis un moment. Elle lui propose de s’inspirer d’une légende selon laquelle une princesse aurait dû passer à l’acte avec cinq hommes entre deux pleines lunes afin de trouver l’âme sœur. Le pari est lancé. Une fois encore, Anne repousse ses limites et accepte. Mais dans un jeu sensuel où l’on se donne corps et âme, jusqu’où peut-on aller et à quel prix ?
Une suite moins classique, c’est le moins qu’on puisse dire ! Cependant ne vous attendez pas à un érotisme poussé. Malgré quelques scènes explicites, le texte reste très sage et l’auteur laisse davantage votre imagination s’évader. Ou s’affoler, c’est selon votre degré de coquinerie. En filigrane, c’est un questionnement sur la représentation de la sexualité dans nos sociétés occidentales que David von Grafenberg met en lumière. Qu’il s’agisse de libertinage, de désir, d’homosexualité, de plaisir féminin mais aussi masculin, tout y est abordé de façon délicate. Et même si les regards et les mentalités changent, il démontre que le chemin est encore long avant que les diverses facettes de la sexualité soient acceptées et évoquées sans tabou.
Un autre élément intéressant de l’histoire est cette panoplie de personnalités fort différentes qui s’imbriquent – sans allusion lubrique – pour former un tout cohérent dans ce microcosme reculé. Il fallait inévitablement cette rencontre entre une femme libérée comme Alessandra et une coincée comme Anne pour que celle-ci parvienne à faire la connaissance approfondie de ses amants : Dominant, Séduisant, Sincère, Rassurant et Aimant. Un peu comme Blanche-Neige avec Grincheux et compagnie mais en plus cochon.
A noter aussi, la surprenante capacité de l’auteur à se glisser dans la peau d’une femme tant du point de vue du psychisme que de la sphère sexuelle. Il va sans dire que c’est un livre sur les femmes et que l’auteur se pose en défenseur de la cause féminine et du droit des femmes de pouvoir disposer de leur corps sans honte et sans limite d’âge.
Au final, Madame de X est un bon livre qui se lit avec délectation tant pour son aspect érotique que pour les bavardages avinés en terrasses ensoleillées, les délicieux dîners tardifs et les jolies descriptions toscanes. Bref, un avant-goût de vacances très chaudes tout en subtilité.