More

    Louise Ringuet : « Dans mon spectacle, je parle du pet vaginal »

    Vous les avez sûrement déjà vus dans un café des Halles ou au Parvis de Saint-Gilles. Irritants, drôles ou attachants, ils laissent rarement indifférents et semblent de plus en plus à la mode. Non, je ne parle pas des Ecolos bobos mais des humoristes de standup. Louise Ringuet a pris cette voie il y a peu, une voie qui la mènera ce lundi 25 février à partager la scène avec Guillermo Guiz pour sa carte blanche au Kings of Comedy Club. Rien que ça. Ça méritait bien un petit entretien parsemé d’autodérision et de blagues de cul. Découverte. 


    Coucou Louise, tu t’es lancée dans le standup il y a peu et les premiers succès commencent à arriver pour toi…

    Non pas du tout en fait. C’est un peu la merde de ce côté-là pour le moment. Personne ne vient à mes spectacles donc je suis obligé de payer les gens pour qu’ils viennent. Bon, pour le moment je n’ai pas encore beaucoup de moyens mais j’espère pouvoir, au fur et à mesure, payer de plus en plus de gens pour finir par remplir mes salles. 

    Ah oui quand même. Pas facile de vivre de l’humour en Belgique donc.

    C’est toujours plus facile que dans le Nord de la France, ma région d’origine, ici au moins on joue en français. Plus sérieusement, je ne connais personne dans mes connaissances qui arrive à vivre de l’humour. Certains en Belgique ont percé comme Alex Vizorek ou Guillermo Guiz. Mais ce sont des exceptions. Les autres, même certains qui tournent beaucoup, doivent combiner leur passion avec un job à côté. Ce qu’on gagne se fait au chapeau (ndlr : qui tourne dans la salle pour rémunérer les artistes) et moi, je cache les billets dans ma culotte. Je sais que là, personne n’ira les chercher. 

    Et pourtant en Belgique nous sommes un pays d’humour.

    Mais le problème principal vient des lieux où les humoristes peuvent se produire. Avant, les jeunes talents ne pouvaient le faire qu’au Kings of Comedy Club qui a commencé à promouvoir des jeunes artistes sur le modèle du Jamel Comedy Club. À présent, le milieu commence à changer et d’autres collectifs apparaissent comme le What the Fun ou le Collectif Yourire et essaient de promouvoir de jeunes artistes. À Bruxelles, j’arrive maintenant à jouer à gauche à droite dans des petits cafés. Il faut éduquer les gens à l’humour mais une culture de standup est en plein développement. La preuve, parfois j’ai des rires dans la salle. En France par contre, les scènes ouvertes sont beaucoup plus répandues, notamment à Paris. 

    Ta première fois sur scène, comment l’as-tu vécue ?

    La première fois, tu fais pipi dans ta culotte. Surtout que tu as tendance à inviter tous tes potes à venir te voir. Et avant de monter sur scène, tu te rends compte que tu n’aurais pas dû (rires). Avec du recul, je me demande aussi comment j’ai osé les ramener. Mais c’est la magie de la première fois, comme dans tout.

    Tu as aussi participé au What The Fun il y a peu.

    Tout à fait. Ils font aussi jouer pas mal d’artistes un peu partout à Bruxelles. Ils ont lancé un concept génial avec le Café des Halles où ils ont fait monter une cinquantaine d’humoristes sur scènes. Chacun avait deux minutes et ça permettait du coup au public d’avoir toute une palette d’humoriste devant eux. 

    Un peu avant cela, tu as écrit ton premier spectacle, un beau challenge.

    Surtout qu’on m’a prévenue trois semaines à l’avance que j’allais devoir le faire. J’ai tout fait à l’envers en fait. Normalement, tu joues un an ou deux pour rôder les différentes parties de ton spectacle et ensuite tu mets tout en place. Moi j’ai écrit mon spectacle après avoir fait trois scènes et maintenant j’essaie de le rôder petit à petit. C’était un gros challenge et surtout pour moi qui suis timide à la base. 

    Et puis, il y a eu la première partie de Jimmy Vandael.

    Exactement. Il m’a proposé de faire sa première partie, peut-être sous l’effet de l’alcool, mais j’ai directement accepté. Après, il ne pouvait plus reculer. C’était une expérience très enrichissante, différente des scènes ouvertes où tu as toujours d’autres artistes pour rattraper le coup si tu foires ta partie. Là, c’était plus stressant. D’autant que les gens ne sont pas venus pour te voir. Mais ça, j’y suis habitué dans ma vie de tous les jours. Je suis un peu la roue de secours.

    Mais ça s’est bien passé puisqu’à la suite de ça, tu as été choisie pour participer à la carte blanche de Guillermo Guiz.

    Tous les lundis, Guillermo Guiz fait venir plusieurs artistes qui participent à son plateau d’humour et en effet, je vais pouvoir le faire lundi 25. Vu qu’il est à Paris, il peut faire venir des gens plus connus. Pour moi, c’est une opportunité de dingue, c’est génial.

    Tu as un univers d’humour qui verse dans le trash, ce n’est pas trop dur à assumer dans une époque du politiquement correct

    L’humour trash est très clivant donc soit le public va être très réceptif et tout va bien se passer, soit il ne va pas l’être du tout. Mais tout est dans l’art de faire monter la pression crescendo. Certains comme Funky Fab ont l’art de rendre le trash digeste. Moi pour l’instant, certains ont encore la nausée.

    Vu ton humour, on ne peut pas éviter la comparaison avec Blanche Gardin et Laura Laune. 

    Ce sont des inspirations mais on s’inspire toujours de plein de choses différentes. Cependant, j’essaie toujours de ne jamais tomber dans la caricature. Mais en tant que femme, nous avons plus tendance à faire du trash. C’est comme si nous voulions montrer aux mecs qu’on avait aussi des couilles (sic). Les femmes jouent d’ailleurs souvent sur le paradoxe de la petite fille sage, l’image qu’on pourrait attendre d’elles. Cela permet de surprendre. On parle aussi pas mal de sexe. On a toujours des blagues de cul de la part des mecs et ça surprend toujours plus dans la bouche des femmes. Dans mon spectacle, je parle du pet vaginal. Quel homme va te parler de ça ? Cela apporte un regard parallèle et c’est ça aussi qui est drôle. 

    Et du côté de la famille ça passe bien ou pas du tout ?

    Mes parents me jugent un peu parfois et me demandent pourquoi je me sens obligé de raconter des trucs dégueulasses alors que je suis une fille intelligente, selon les critères du Nord de la France. Au contraire, je pense que l’humour doit être une manière de casser les clichés. Ce n’est pas parce que tu parles de cul que tu n’es pas quelqu’un d’intelligent. Après, c’est un peu la honte de jouer mes spectacles devant mes parents car mon père passe pour un gros pédophile. Les dîners de famille sont compliqués mais dans le Nord de la France, c’est normal. 

    Plus d’infos sur : https://www.kocc.be/agenda/

    Olivier Eggermont
    Olivier Eggermont
    Journaliste du Suricate Magazine

    Derniers Articles