Logan
de James Mangold
Action, Science-fiction, Aventure
Avec Hugh Jackman, Patrick Stewart, Dafne Keen
Sorti le 1er mars 2017
La sortie de longs-métrages à budget réduit comme l’excellent Dredd (Pete Travis, 2012) et le plus récent Deadpool (Tim Miller, 2016) ont montré à Hollywood qu’il était possible de donner naissance à un film de super-héros de qualité sans verser dans la surenchère de décors et d’effets spéciaux. Au-delà de ça, le succès inattendu rencontré par Deadpool a rassuré les producteurs de la Fox et ouvert la porte à un cinéma super-héroïque davantage tourné vers un public plus averti. Exit le côté kid-friendly donc, place aux jurons et à la violence crue.
Cette liberté nouvelle est ce qui manquait depuis toujours au personnage de Wolverine, antihéros par excellence, agressif, animal, fumeur et buveur invétéré. La classification R-Rated de ce troisième opus tient donc lieu de libération et offre au personnage de Logan une émancipation trop longtemps attendue qui l’approche davantage du comics dont il est issu. Disons-le d’avance, cette liberté de ton et la volonté de ce nouvel épisode d’éviter la surenchère de ses prédécesseurs font de Logan le meilleur épisode de la trilogie lancée en 2009. Et de très loin…
En 2029, Logan (Hugh Jackman) est devenu un être désabusé. Malade, fatigué et alcoolique, l’ancien X-Men est désormais chauffeur de limousine et veille sur le Professeur Xavier (Patrick Stewart) qu’il tient à l’abri des regards dans une ancienne exploitation agricole à la frontière avec le Mexique. Sa tranquillité sera interrompue lorsque Gabriela (Elizabeth Rodriguez) sollicitera son aide afin d’escorter sa fille Laura (Dafne Keen) en lieu sûr. Mais ce voyage ne sera pas de tout repos…
Dès le départ, Logan se démarque de ses prédécesseurs en donnant à voir un Wolverine très peu vaillant, incapable de faire preuve de la même hargne au combat qu’autrefois. On apprendra alors rapidement qu’aucun mutant n’est plus venu au monde depuis 25 ans et que Logan et le Professeur Xavier se cachent depuis plusieurs années. Ces prémisses donneront naissance à un néo-western sauvage, situé quelque part entre Mad Max et certains films de Sam Peckinpah (comme par exemple les excellents « Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia » [1974] et « Guet-Apens » [1972]). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce côté sauvage sied à merveille au personnage de Wolverine. Cette approche du héros donnera lieu à un film bien plus riche que ce à quoi on aurait pu s’attendre : sans le côté lisse et aseptisé des précédents épisodes, Wolverine gagne en crédibilité. Le film tout entier aussi par la même occasion.
Mais surtout, les choix scénaristiques de ce nouvel opus permettent à Patrick Stewart et Hugh Jackman de donner plus librement cours à leurs talents. Bien loin du formatage des précédents films de la licence X-Men, « Logan » permet à ces comédiens talentueux d’offrir une performance nettement plus nuancée. Pas de quoi remporter un Oscar bien entendu (quoique, si Suicide Squad y est arrivé, tout est désormais possible…) mais le film y gagne en profondeur. Ajoutons à ces deux performances celle de Stephen Merchant qui – hormis son indéfectible accent britannique – est méconnaissable et livre lui aussi une belle interprétation du personnage de Caliban.
À côté de ces nombreuses qualités, « Logan » n’est cependant pas exempt de défauts. Avant tout, Pierce (Boyd Holbrook), l’un des principaux antagonistes est une caricature ambulante qui ne représente pas la moindre menace pour nos héros, et il aura vite fait de lasser le spectateur. Quant à X-24, second grand rival de Wolverine tout droit inspiré de « Terminator Genisys », on comprendra rapidement quelle sera sa destinée. Ensuite, les chorégraphies des scènes d’action ne sont pas particulièrement impressionnantes, et Hugh Jackman semble parfois peiner à les réaliser – ce qui, au fond, colle parfaitement au personnage de Logan, présenté dans cet épisode comme étant à bout de forces. Enfin, il semble que le film pourrait être raccourci d’une trentaine de minutes : bien qu’il s’agisse d’un excellent divertissement, les deux heures et dix-sept minutes que constituent Logan peuvent par moments lasser, et plusieurs séquences semblent tout à fait dispensables. Quelques coupes donneraient lieu à un film mieux condensé et mieux rythmé.
En point final, Logan nous offrira également plusieurs références explicites au chef d’œuvre de George Stevens « L’homme des vallées perdues » (1953), notamment dans son questionnement sur la violence : « There’s no living with… with a killing. There’s no going back from one. Right or wrong, it’s a brand. A brand sticks. There’s no going back ». Par là-même, le personnage de Logan se livre à une introspection de ce que fut sa vie et son héritage. Assurément, le plus intelligent et le plus réussi des Wolverine. Une belle façon pour Hugh Jackman de raccrocher les griffes !