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    Liebman renégat au Varia

    De et avec Riton Liebman, en collaboration avec David Murgia

    Du 12 au 21 mars 2015 à 20h30 au Théâtre Varia

    Penseur du monde en transition, politologue sociologue de la condition sociale, professeur émérite à l’Université Libre de Bruxelles, Marcel Liebman était un intellectuel de renom et il était juif. Au cœur de sa conviction, empreint d’une confession traumatisée par une Histoire récente, Marcel Liebman était perçu par beaucoup comme un renégat. A l’origine du procès, une conviction : les juifs d’Israël sont venus spolier les Palestiniens de leurs terres et rien, pas même l’atrocité innommable de la seconde guerre mondiale, ne pourra justifier de telles pratiques colonisatrices. Marcel Liebman était aussi père et, le soir, lors du rituel du coucher, il venait conter à ses enfants les remèdes à l’ennui qu’il mettait en place avec ses frères dans les caves et les pensionnats où ils étaient forcés de se cacher.

    Sur scène, Riton Liebman, l’un des fils de Marcel, rend hommage à celui qui a su se construire un nom tout en prônant haut et fort des idées à contre-courant. A travers ce récit, des souvenirs d’enfance et des échos fréquents à la vie de famille, comme un album que l’on ouvre pour retracer la vie que l’on a construite avec ses proches. Dans Liebman renégat, on est touché par la démarche car, à moins d’être insensible, on ne peut que se sentir atteint par le message d’hommage que le fils adresse au père et par toute la fierté qui émane du discours. Accompagné par des bribes de musique – des mélodies jouées au piano et au violon, des extraits de rock seventies sur platine vinyle – Riton reprend le fil de son existence à lui, ses cavalcades dans le monde, le tout placé sous le prisme d’un père boulimique de savoir et de connaissance.

    Ce spectacle est donc touchant. Au-delà de cette dimension, toutefois, un gros doute : qu’a-t-il, dans le fond, de pertinent à nous raconter ce cher Riton ? Bien souvent, on cherche le fil et de nombreuses maladresses se glissent çà et là, en ce soir de première. Les joutes humoristiques fonctionnent au compte-gouttes et, bien que la salle soit pleine, on a l’impression que l’euphorie n’émane que des proches de Riton. Et puis, il fait un peu mal au cœur ce fiston qui n’a d’autres anecdotes à relater que ses descentes de la Chaussée d’Ixelles, ivre et inconscient, au lendemain de guindailles post-adolescentes. Alors, oui, la démarche est belle mais on ne peut s’empêcher de se sentir au milieu d’une réunion de famille et on se demande si, en tant que spectateur, on y a vraiment sa place.

    Malgré les dérapages, Riton Liebman a du potentiel et on ne peut nier qu’il sait employer la verve pour attirer l’attention sur lui. Et, même si on a parfois le sentiment qu’il nous fait son show en soirée, il tient l’assemblée qui s’est déplacée en masse pour lui. Comme l’impression d’assister à la déclaration de bonnes intentions du fils que l’admiration pour le père a toujours guidé.

    Retenons toutefois cela : Liebman renégat est un spectacle tout en filiation qui met en lumière la beauté de la relation qui unit un fils à son père.

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