Mise en scène et scénographie d’Amel Roussel. Avec Nadège Cathelineau, Romain Cinter, Thomas Dubot, Julien Frege, Amandine Laval, Nicolas Luçon, Florence Minder, Julie Rens, Sophie Sénécaut, Lode Thiery, Sacha Vovk, Judith Williquet, Uiko Watanabe. Du 25 avril au 5 mai 2018 au Théâtre National. Crédit photo : Hubert Amiel.
Au printemps, la sève monte ; elle monte, monte et monte et explose en une myriade de couleurs et de textures. Ici, la sève monte, monte et monte dans le sang chaud de ces adolescents et leur explose en pleine face, une sève qui charrie avec elle les duretés de la vie, l’échec, la mort mais aussi la sexualité, et en quelque sorte la fin de l’innocence.
Sur la terre battue, Wendla, Martha, Melchior, Moritz explorent la vie dans ses recoins les plus âpres, ils se dénudent le cœur et le corps, littéralement. Des jeunes hommes et des jeunes femmes qui étalent leur chair sans pudeur, s’effleurent, se cherchent, se désirent, se contraignent aussi, se détruisent.
L’éveil du printemps, la pièce de Frank Wedekind, publiée en 1891, est sous-titrée très justement « Une tragédie enfantine ». C’est une pièce peu connue ayant marqué cependant tout un pan de l’histoire artistique moderne allemande et plus. Le résultat de l’adaptation de cette pièce par Armel Roussell est mitigé.
En grande partie, la faute revient à une mise en scène chargée, tachetée de-ci de-là par un sur jeu de la part de certains acteurs. Loin de nous d’être puritain et de n’accepter que dans l’intimité la nudité et la démonstration du désir mais à jouer et surligner l’excitation, on frise le ridicule. La mise en scène aurait gagné à être plus légère dans la forme tout en gardant toute son originalité et sa fraîcheur d’apparat.
En entrant dans la salle, l’odeur de la terre étalée sur la scène saisi et les deux jeunes femmes juchées sur une estrade, revisitant des tubes actuels, enchantent et donnent le tempo directement, entrée en matière plaisante.
Les histoires et autres déroutes et désenchantements se succèdent dans un texte fort et gardant toute sa charge émotionnelle et sa pertinence dans notre époque. Car L’éveil du printemps parle de l’adolescent qui se voit confronter aux limites de son corps et de son esprit mais aussi à toutes ses possibilités et responsabilités.
Si ce n’est quelques lourdeurs et longueurs, si ce n’est quelques moments oscillant entre le ridicule et la performance, la pièce ira nous tirer des émotions brutes, des souvenirs d’adolescence à la fois libre et déjà contrainte par les aléas d’une vie d’adulte.