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    Les Oiseaux de passage, sur l’autel de l’insouciance

    Titre : Les Oiseaux de passage
    Auteure : Emily Barnett
    Editions : Flammarion
    Date de parution : 1er mai 2019
    Genre : Roman

    Quatre années après la sortie de Mary, Emily Barnett signe son second roman avec Les Oiseaux de passage, l’histoire d’un groupe d’adolescents de la rive gauche sur fond d’attentats terroristes. 

    13 novembre 2015, Juliette enfourche son vélo pour se rendre chez un ami. Mais en cette soirée d’automne, les rues du XIème arrondissement ne sont plus les mêmes. Des gens errent, l’air hagard, fuyant des scènes de guerre et d’horreur survenues à quelques dizaines de mètres de là, au bar Le Carillon. Au milieu de ce chaos mortifère, Juliette croise un homme blessé, il s’agit de Paul. Vingt ans plus tôt, Juliette et Paul faisaient partie du même groupe d’amis, celui qui aimait débattre jusqu’à pas d’heure au bar Les Oiseaux de passage. Entre l’incompréhension du temps présent et les non-dits d’instants passés, les deux Parisiens vont déambuler dans les rues de la capitale à la recherche de vérités.

    A ne pas confondre avec le film éponyme sorti récemment, Les Oiseaux de passage possède toutes les qualités de la pépite littéraire qu’on se complaît à conseiller aux amis plusieurs mois après sa sortie. D’une part, le second roman d’Emily Barnett est divisé de telle manière que les évènements relatés – particulièrement ceux qui appartiennent au passé – se succèdent à une allure soutenue, sans contemplation particulière pour un fait anodin. Au contraire, tout est dévoilé au rythme de la mémoire, celle de sa narratrice, rendant réaliste et prégnant le cheminement psychologique de nos deux anciens camarades. D’autre part, Emily Barnett possède un talent d’écriture incontestable. Chaque mot est astucieusement pesé pour qu’il puisse s’inscrire dans l’harmonie du roman et ce, sans avoir recours à un phrasé pompeux, pirouette indigeste pour le lecteur lambda.

    Si la forme du récit est une réussite, le fond n’a en rien été délaissé par l’auteure. Dans son ouvrage, Emily Barnett s’évertue à déconstruire un mythe : celui de l’insouciance. L’insouciance de la société privilégiée au sein de laquelle Juliette baigne depuis sa tendre enfance, mais aussi l’insouciance d’une certaine jeunesse, celle des années 90 où les destins se croisent et s’entrecroisent sans toutefois réussir à s’accrocher. Ce tableau désenchanté prend la forme d’un groupe d’amis, un groupe de référence pour Juliette qui peine parfois à y trouver sa place. Echanges de regards, jeux d’influences et combats d’orgueil sont le quotidien de ce groupe de jeunes parisiens qui s’aiment sans se l’avouer, qui se haïssent sans se le dire. Un magnifique récit sur l’interaction sociale et sur la place de l’autre que nous dévoile avec finesse Emily Barnett.

    On ne pourrait donc que vous encourager à lire les 190 pages de cet ouvrage qui se dévore en quelques heures. On en ressort avec un mélange d’espoir et de mélancolie, agacé toutefois – et c’est le seul bémol à souligner – par les portraits des protagonistes du récit, jeunes bobos parisiens à la prétention presque pathologique et à la destinée admirable. Cela provoque un manque d’empathie du lecteur, pourtant nécessaire.

    En résumé, Les Oiseaux de passage est une belle découverte littéraire, tant sur le fond que sur la forme. Nul doute qu’une place de choix est déjà réservée dans les librairies pour le prochain roman d’Emily Barnett.

    Matthieu Matthys
    Matthieu Matthys
    Directeur de publication - responsable cinéma du Suricate Magazine.

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