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    Les lettres de mon père : l’indépendance du Congo à travers les souvenirs d’Agnès, 8 ans

    Conception, écriture & jeu Agnès Limbos. Du 13 février au 18 février 2024 du Théâtre des Martyrs au Théâtre de la Montagne Magique

    La famille d’Agnès Limbos, autrice de la pièce Les lettres de mon père, s’installe au Congo en 1959. Son père prend la direction de l’Ecole des cadres. Au moment de l’indépendance (30 juin 1960), c’est-à-dire un an après, les enfants sont envoyés en Belgique chez leur oncle Pierre, un curé. Pour Agnès, 8 ans, c’est évidemment un drame. Elle a choisi de partager son ressenti au travers du théâtre d’objet, accompagnée d’une marionnette, sosie de la petite Agnès. Avec pudeur et retenue, elle raconte cette période, chargée de racisme, de paternalisme et, pour elle, des affres de l’abandon. Une création très personnelle et touchante.

    Chez l’Oncle Pierre alias Tonton Pétrus, Monsieur le curé, ou encore le frère de sa mère, les enfants attendent les lettres hebdomadaires de leur père, 46 au total. A chaque nouvelle missive, ils s’installent dans de gros fauteuils en cuir et écoutent attentivement la lecture qui leur en est faite.

    Traumatisée par cette période, Agnès Limbos a souhaité la décortiquer, sous plusieurs plans. Celui de l’éloignement d’abord, de l’abandon qu’elle a ressenti : papa, maman, Léopoldville – « petit jardin de Léopold II » – d’un côté, Dongelberg, « charmant petit village du Brabant Wallon » et son oncle de l’autre.

    Beaucoup d’intelligence, d’humour et de poésie dans ce spectacle teinté de nostalgie. Les objets évoquent des lieux, des ambiances, des personnages : la cantine de l’école, le fauteuil, l’église, le dortoir, la petite sacoche de Madame Jadoul (femme du curé).

    A travers ce regard enfantin, on découvre aussi une critique de l’église et de ses postulats : « Petit Jésus, cette douleur, je te l’offre » et un plaidoyer contre Léopold II. Les lettres ne sont pas très affectueuses, invitant les enfants à « devenir grands et raisonnables ». Elles comportent toujours une référence religieuse « Faites une bonne action chaque jour, travaillez bien à l’école, soyez sage, ne criez pas, priez pour votre papa ». On imagine le traumatisme de la petite Agnès, qui pourtant ne se plaint pas.

    En filigrane, les événements politiques de l’époque, le mariage du roi Baudouin, Lumumba, des coups de feu, une visite de Mobutu « un brave homme qui fait son possible pour que les Congolais obéissent et se conduisent bien », l’atterrissage de « Globe Masters » américains. La révolte gronde. La musique est grave, angoissante. A présent, les objets sont des mains coupées. Léopold II est ridiculisé. Un spectacle riche d’évocations au rythme lent. Un mélange d’évènements banals, chronique de la vie ordinaire, et majeurs, l’indépendance du Congo. Une très belle découverte.

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