Titre : Les esclaves de l’homme-pétrole
Auteur : Quentin Müller et Sebastian Castelier
Editions : Marchialy
Date de parution : 12 octobre 2022
Genre : Enquête, reportage
Alors que le Qatar s’apprête à accueillir la Coupe du monde de football dans quelques semaines et que la polémique sur les conditions dans lesquelles les stades ont été construits fait rage, il est sain de prendre un peu de hauteur et d’analyser de manière globale les conditions de travail des millions de personnes venues dans la péninsule arabique en quête d’un avenir meilleur. C’est le travail journalistique entrepris par Quentin Müller et Sebastian Castelier dans leur passionnant ouvrage Les esclaves de l’homme-pétrole paru aux éditions Marchialy.
Exploitation systématique
A travers le témoignage de plusieurs dizaines de personnes originaires d’Afrique ou d’Asie, les deux journalistes montrent que, loin d’être un phénomène confiné à la construction de stades, c’est l’ensemble du spectaculaire développement économique de cette région du monde qui est basé sur l’exploitation intensive d’une main d’œuvre pauvre et corvéable à merci. Outre les exactions largement documentées dans le secteur du bâtiment – plusieurs milliers d’ouvriers meurent chaque année dans des accidents du travail dans cette région du monde – cette enquête nous révèlent que c’est l’ensemble du marché du travail qui est traversé par ces abus, les personnes les moins qualifiées et les plus dépendantes économiquement en subissant la plus grande part. Passeports confisqués, violence physique et psychologique, absence d’horaires de travail, salaires non payés, racisme systémique, il ne fait pas bon travailler dans ces pays lorsque l’on ne vient pas d’une contrée riche.
C’est d’ailleurs cette hypocrisie qui est un des points les plus choquants de cet ouvrage. Si ces pays, grâce à d’onéreuses campagnes de communication se présentent comme des champions de la vertu, ouverts d’esprit et prêt à accueillir le monde entier, la réalité est tout autre. Ce miracle n’est en réalité qu’un mirage, ces villes du désert ayant été construites grâce au sang et à la sueur de travailleurs obligés de fuir la misère dans leur pays. Et au vu de la dépendance énergétique occidentale d’une part et de celle, économique, des pays pourvoyeurs de main d’œuvre d’autre part, il ne faut malheureusement pas s’attendre à ce que la situation évolue d’ici peu.