Titre : Le temps des copains
Auteurs : Vincent Cuvellier et Jeff Pourquié
Éditions : Casterman
Date de parution : 11 septembre 2024
Genre : Bande dessinée
« C’est le temps de l’amour, le temps des copains et de l’aventure. Quand le temps va et vient, on ne pense à rien, malgré ses blessures ». Quelques paroles mythiques fredonnées sur un air folk, génération yéyé, derrière lesquelles se cachent quelques grands noms du rock français.
Alors que le Paris des années cinquante fredonne et swingue avec Trenet, le square de la Trinité voit se réunir une bande de gavroches, passionnés par la musique des amerloques et constamment à la recherche de belles pépées à bécoter. C’est la naissance du rock français. Plus qu’un mouvement musical qui demande à faire ses preuves outre-atlantique, c’est un style de vie. Codes vestimentaires, coupes de cheveux, attitudes rebelles. Ces ados qui sont à l’avant-garde, deviendront bientôt connus sous les noms de Johnny Halliday, Eddy Mitchell, Jacques Dutronc ou encore Françoise Hardy.
Mais en attendant, ce sont surtout des gamins qui dragouillent maladroitement, vagabondent et jouent les caïds dans des gangs. Il y à Montholon, Clignancourt mais eux, c’est des cons. Par contre, les saccos, ils rigolent pas. Mais c’est pas grave parce qu’ils les pètent quand même. Enfin c’est ce que le chef Jean-Claude dit. Les artères parisiennes leur appartiennent. Leur passion commune, c’est la musique. Une musique qui gigote et qui ne plaît pas trop aux aînés. Bref, ce sont des adolescents, gentiment rebelles. Leur histoire est à la fois universelle, et foutrement générationnelle.
Générationnel, tout comme l’album. Baby boomers et soixante-huitards qui se respectent ne manqueront pas les références qui jalonnent le récit. Ne serait-ce que dans le parler. On éructe des lolos à gogo et autres joyeuseries de l’époque. Et puis il y a les personnages. On ne peut plus fidèles à eux-mêmes. On reconnaît Mitchell à son humour flegmatique et décalé, les poses et le physique de Johnny Halliday. Et pourtant jamais Cuvellier et Pourquié ne nous révèlent qui ils sont. C’est la quatrième de couverture qui les trahit. Et surtout, leur attitude. Non on ne nous dit pas que la Françoise qui tire nonchalamment la main de sa petite sœur et qui éponge les remarques que son milieu petit-bourgeois adresse sur son physique, que cette Françoise est en fait Françoise Hardy. Pas plus qu’on nous dit que Jean-Philippe, avec sa bouche épaisse et sa mèche volumineuse chantera un jour « Allumer le feu ». À ceux qui connaissent bien l’époque de le deviner ! Mais ceux-là commencent à avoir fait leur temps. Heureusement, le visuel offre une seconde jeunesse au récit. Sous ses airs de bande dessinée traditionnelle, Le temps des copains adopte un dessin moderne, avec des couleurs vigoureuses et un trait légèrement hésitant et particulièrement souligné. Le temps des copains c’est la fraternité. Le rock’n roll god damn ! Mais aussi, un vent de fraîcheur qui souffle avec nostalgie sur la planète des vieux.