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    « Le Temps d’aimer », histoire intime

    Le Temps d’aimer
    de Katell Quillévéré
    Drame, Romance
    Avec Anaïs Demoustier, Vincent Lacoste, Morgan Bailey
    Sortie le 29 novembre 2023

    Après trois long-métrages placés sous le signe de l’intime, Katell Quillévéré fait cette fois-ci naitre son récit du terreau fertile de l’histoire, en s’emparant d’un épisode peu commenté par la fiction contemporaine : les « tondues » de la libération. Accusées à tort ou à raison d’avoir collaboré avec l’occupant nazi, entre 20000 et 40000 femmes françaises auraient été publiquement humiliées, tondues, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. La cinéaste prend appui sur le réel et ouvre son film sur des images d’archives d’une saisissante cruauté, avant qu’une suture imperceptible avec la fiction ne nous lance sur la piste de Madeleine, jeune victime de l’opprobre populaire et enceinte d’un soldat allemand.

    Anaïs Demoustier trouve ici un rôle à sa mesure avec ce personnage de jeune mère encombrée par un enfant qui la condamne à l’exclusion. Il lui faut bien toute sa palette de jeu, de l’espiègle légèreté à la noirceur insoupçonnée de son regard, pour donner du relief à ce personnage peu aimable et ambivalent. Son partenaire de jeu Vincent Lacoste n’est pas en reste et parvient à susciter l’émotion pour sa partition d’homme mélancolique corseté par un inavouable secret. Ils composent ensemble un couple tourmenté, envisagé comme une fable écrite à quatre mains où abriter leurs parts d’ombre respectives. Leur alchimie est évidente, particulièrement dans une magnifique scène de sexe à trois où tout passe par le regard : le désir, la jalousie, la peur, l’abandon et la honte.

    Malgré tout, le film pâtit quelque peu de son horizon narratif colossal d’embrasser plus de vingt ans de la vie d’un couple et autant d’évolutions sociétales. On sent l’envie de Katell Quillévéré d’aborder des questions qui l’animent telles que la fabrique du couple, la maternité, la filiation, l’homosexualité, mais qui auraient sans doute chacune mérité un film dédié. Sa mise en scène autrefois sobre et naturaliste (le magnifique Un poison violent) tente ici de s’accommoder de la forme mélodramatique, sans jamais complètement y arriver – la faute à une reconstitution historique ambitieuse mais lourde, limitante. Le Temps d’aimer reste néanmoins un film attachant, travaillés par les motifs de la famille et de l’amour qui continuent d’irriguer l’œuvre de la réalisatrice.

    Arthur Bouet
    Arthur Bouet
    Journaliste

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