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    Le puits : Un conte sur l’eau

    Scénario : Jacob Wyatt
    Dessin : Felicia Choo
    Éditeur : Dargaud, Combo
    Sortie : 19 janvier 2024
    Genre : Fantastique

    Des vastes terres, il ne reste rien. Rien que quelques récits d’inondations et de migrations qui racontent comment, après des années d’exil, les ancêtres ont été recrachés par des vagues démesurées sur l’île de Shui Jing. Source d’eau potable, le chapelet de terres auquel Shui Jing appartient, leur a apporté le salut. Ils ont bâti des maisons et ouvert des commerces. Et ils ont honoré le puits, comme les générations futures, en lui confiant leurs souhaits.

    Et pourtant, le puits n’a pas suffi à les protéger. Un matin, un voile de brume se déposa sur les villages. Très vite, la lumière ne fut plus qu’un souvenir poussiéreux. Et le soleil, avalé par une nuit sans fin. L’obscurité gagna du terrain, plongeant le livre dans une palette restreinte de couleur aux accents de Tillie Walden. Et puis les monstres se réveillèrent. De tous, le léviathan était le plus dangereux. Seule une sorcière de haut niveau, comme la mère de Lizzy, pouvait espérer venir à bout de cet assassin tentaculaire qui terrorisait les foyers. Ainsi fut. Le léviathan ne revint jamais. Mais la sorcière non plus. Lizzy fut alors élevé par son chevrier de grand-père. Mais son existence douce – bien qu’obstruée par ce brouillard noir qui ne s’était pas dissipé – prit une tournure malheureuse. En se laissant tentée par l’or qui tapissait le puits, elle commit l’irréparable. Voler des souhaits ne peut rester impuni.

    Brassage de cultures

    Lizzy doit se racheter. Le Puits s’ouvre en un voyage et se raconte comme une quête. Alors qu’un océan sépare les deux auteurs, l’Américain Jake Wyatt et l’Australien.ne Choo, leurs personnages ne cessent de prendre les voiles, navigant d’île en île. Pas étonnant que dans son dessin même, Lizzy semble rapprocher les cultures. Ses traits sont métissés. Elle est l’héroïne d’une bande dessinée qui répond à la tradition occidentale, mais les marques d’expressivité qui rident son visage et ses mimiques exagérées ne sont pas sans rappeler l’univers du manga. Malheureusement pour elle, ce n’est pas le mariage graphique heureux dont elle est le fruit qui va nous la rendre sympathique. Avec l’air de toujours être en train de hurler, elle est, à bien des égards, très irritante. Mais soit.

    Même la narration, dans ce qu’elle a de fantastique, semble brasser les cultures : à la lisière du conte médiéval et du mythe asiatique. Serait-ce une coïncidence que la première image du Puits soit celle d’une vague, ressemblant étrangement à la plus célèbre estampe japonaise ? Si la vague illustre l’influence du manga dans l’univers des auteurs, elle annonce surtout l’importance de l’eau dans le récit. L’eau qui fragmente les terres et sur laquelle les personnages ne cessent de naviguer. L’omniprésence de cette eau lourde et noire est troublante. Mais elle donne aussi du rythme. Elle nous berce et nous embarque loin. Au cœur d’une histoire sans lieu et sans époque.

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