Titre : Le Glouton
Auteur : A.K. Baklemore
Maison d’édition : Globe
Date de parution : 16 janvier 2025
Genre du livre : Roman
On pourrait dire sans mauvais jeu de mots que son sujet lui a été servi sur un plateau. En poussant un peu le vice, on pourrait même qualifier d’alléchante l’histoire vraie dont s’est inspiré A.K. Blakemore pour son livre. Nous sommes en Vendémiaire de l’An VII – soit en septembre 1793 du calendrier républicain – et Tarare va bientôt succomber des suites d’une forme d’hyperphagie extrême. C’est à Soeur Perpetue que revient la lourde tâche de veiller sur cette créature d’apparence humaine qui agonise enchaînée à son lit d’hôpital et dont on raconte qu’elle peut dévorer toutes sortes de choses, vivantes, mortes ou inertes. Tarare – qui, on le rappelle, aurait réellement existé – est un monstre. Et comme tous les monstres, sa légende s’est construite sur de sanglantes rumeurs. Certaines vont même jusqu’à le rendre coupable d’avoir mangé un enfant. Et si la barbarie dont on l’accuse est à nuancer, une chose est bel et bien certaine : son appétit est insatiable. Tarare a faim. En permanence. Et sans fin.
Le parti-pris de Baklemore – s’éloignant au passage de la version qu’en donne Wikipédia – est de ne pas faire appartenir la compulsivité de l’appétit de Tarare au domaine de l’inné. Tarare est un enfant doux, aussi modéré dans son caractère que dans son rapport à la nourriture. Et c’est d’ailleurs ce qui va le mener à sa perte. Alors que s’annonce la Terreur, la naïveté et la gentillesse se payent à prix d’or. Tarare va l’apprendre à ses dépens. C’est après un incident qui aurait pu lui coûter la vie que le jeune homme devient, donc, ce monstre perpétuellement affamé. Comme si la faim venait compenser le manque d’amour dont pourrait souffrir un garçon trop candide. Évidemment, pour en rajouter à son malheur, le talent de Tarare est repéré par une troupe de saltimbanques qui n’hésitent pas à l’instrumentaliser pour faire du profit. Et d’un coup, la réappropriation de l’histoire par l’autrice prend tout son sens. Baklemore fait de ce récit de curiosité une critique sociale, comme pour dire : « On ne naît pas mauvais, on le devient ». Autrement dit, les monstres ne naissent pas monstres. Ils sont le produit de l’homme.
Baklemore est une jeune autrice qui a fait ses premières armes dans la poésie. Il est donc logique qu’elle soit particulièrement attachée au lyrisme de l’écriture, alors même qu’elle saute le pas de la fiction. Mais ses envolées paraissent fort démonstratives. Elles peinent à transmettre des images, encore trop empreintes d’une volonté esthétique. Et pourtant, c’est d’images dont a besoin le lecteur qui pourrait tout aussi bien découvrir l’histoire de Tarare sur internet. Mais malgré cette faiblesse, Le Glouton est prometteur. Aussi prometteur que l’est son autrice qui amorce déjà dans ce livre, un univers riche et extrêmement bien documenté.