auteur : Jean Pruvost
édition : JC Lattès
sorti le : octobre 2014
genre : Dictionnaire, histoire
Projet lancé par la maison d’éditions JC Lattès, Le Dico des dictionnaires rassemble de nombreuses anecdotes, réflexions et notes historiques sur la bible des mots. Réparties entre toutes les lettres de l’alphabet, ces entrées vous proposent de vous questionner sur la nature d’un dictionnaire mais aussi de découvrir des histoires à propos des grands noms qui ont joué un rôle dans son histoire.
Les habitudes de lecture du dictionnaire ont bien changé depuis qu’il était lu in extenso sous Louis XIV et par certains au XIXème, pour ensuite connaître un usage consultatif. Le Dico des dictionnaires quant à lui n’est ni tout à fait à lire in extenso ni tout à fait à facture consultative tant le contenu des entrées échappe à la définition objectivante. Impossible donc d’être motivé par une démarche autre que la curiosité pour consulter tel ou tel article dans le dico. La surprise est donc au rendez-vous. Vous serez certains d’y apprendre quelque chose, même si ce n’était pas ce que vous y cherchiez.
La question est de savoir si Jean Pruvost arrive à transmettre le virus que lui avait auparavant transmis Bernard Quemada. La matière est, en soi, passionnante mais ne s’adapte pas bien à son choix d’en faire un dictionnaire d’anecdotes. On imagine en effet parfaitement se passionner pour cette matière dans le cadre d’une salle de cours à l’université. En effet, si cette structure disparate semble parfaite pour le medium oral, elle a du mal à capter l’attention quand elle se retrouve à l’écrit.
Le ton très personnel et auto-référencé de Pruvost prend une grande place par rapport à son message, faisant passer au second plan l’aspect historique pour favoriser l’anecdote. On se pose donc légitimement la question de la pertinence du livre qui aurait mérité à prendre plus de recul par rapport à son auteur qu’on imagine facilement être un très bon orateur.
Le style est humoristique et hachuré mais la syntaxe multiplie les digressions, rendant la lecture complexe et lente. Le choix d’un langage soutenu tout à fait judicieux, mis en parallèle avec un ton qui tente de rendre le message léger et sympathique, pose la question du public auquel Pruvost s’adresse. Essaie-t-il de convaincre les sceptiques que sa matière est digne d’intérêt grâce à l’humour ou prêche-t-il aux convertis en parlant leur langage ? La réponse n’est pas claire.
Le Dico des dictionnaires est donc un ouvrage intéressant sur le fond: Pruvost est un expert en la matière et met beaucoup d’entrain à la tâche. Malheureusement, la structure rend le message difficile d’accès et rebutera les moins courageux. Sous une forme moins chaotique, le livre aurait été vraiment passionnant et aurait peut-être aidé à intégrer le ton humoristique de manière plus efficace.