D’après Manuel Puig. Mise en scène de Laurent Capulleto. Avec Itsik Elbaz et Antoine Guillaume. Du 29 mai au 29 juin 2024 au Théâtre Le Public.
Le baiser de la femme araignée est un roman écrit par Manuel Puig en 1975. L’histoire se déroule dans une cellule de prison. Deux hommes sont victimes de la barbarie d’un pays totalitaire (à l’origine, le Brésil). Molina, homosexuel, est étalagiste, Valentin est un journaliste révolutionnaire. Difficile de trouver deux codétenus plus incompatibles. Ce huis clos oppressant n’a rien perdu de sa pertinence, les dictatures étant malheureusement toujours d’actualité. Itsik Elbaz et Antoine Guillaume incarnent les détenus avec beaucoup de justesse, permettant au spectateur de ressentir chaque nuance de leur relation évolutive.
Assister à l’adaptation théâtrale de l’œuvre de Manuel Puig est une expérience intense. La scène de la petite salle du Théâtre Le Public, méticuleusement décorée en cellule de prison, plonge le spectateur dans l’univers oppressant et étouffant de Molina et Valentin, les deux protagonistes. Ce décor simple mais efficace sert de toile de fond à une histoire complexe, remplie de révélations personnelles.
Molina a été arrêté pour détournement de mineur. Comme sa mère était ouvreuse de nuit pour joindre les deux bouts, il a vécu dans une atmosphère cinématographique depuis son enfance. Très sensible, il passe son temps à interpréter les rôles principaux de grands succès romantiques, un genre qui ne convainc pas vraiment son compagnon d’infortune.
Valentin a été torturé à cause de ses convictions. Issu d’un milieu bourgeois, sa vie est dédiée à la révolution sociale. Quand Molina interprète un rôle, Valentin analyse le contexte socio-politique du film. Peu à peu, ils apprennent l’un de l’autre. L’étalagiste apprécie la beauté des choses, la valeur de l’instant présent, ce que Valentin est incapable de faire.
Molina, avec son imaginaire débordant et son besoin de relations est incarné avec une sensibilité et une profondeur très touchante. Valentin est interprété avec une intensité brute et une complexité qui rendent son personnage fascinant. La transformation de leur relation improbable est au cœur rrde la pièce.
La mise en scène sobre de Laurent Capelluto utilise l’ensemble de l’espace disponible intégrant presque le spectateur à la cellule. Beaucoup d’humanité se dégage des dialogues qui abordent des thèmes fondamentaux comme la répression politique, la survie en prison ou la redéfinition des genres. Un spectacle captivant, de bout en bout.