More

    L’Avenir : coincés dans une inaptitude à vivre 

    Dernier volet d’une trilogie sur les lieux communs, l’Avenir, pièce de la compagnie Nature II mise en scène par Magrit Coulon, tourne en dérision les rituels dans une société marquée par la solitude et la perte de sens. 

    Un futur où le temps s’est arrêté

    Dans un lieu de passage blafard, tapissé de longs rideaux, trois personnes attablées devant des tasses de café vides regardent tour à tour les spectateurs et le vide. Le silence de l’observation et du questionnement domine les longues premières minutes de l’Avenir et nous force à tourner le regard vers l’horloge accrochée sur le côté droit de la scène. Dommage, même celle-ci s’est arrêtée. Impossible donc de savoir combien de temps nous allons rester là, à nous contempler et à esquisser des sourires gênés. 

    C’est là tout l’objet de la pièce : comment faire semblant ? comment sortir de la torpeur ambiante et montrer que nous sommes bien vivants ? comment vit-on l’ennui ? 

    Avec une absence quasi totale de communication, les protagonistes, sans nom et sans histoire, se relaient sur scène, se croisent, s’évitent, se (et nous) désespèrent mutuellement. Comme une valse infinie de corps, errant sans but, et peinant à se rappeler comment faire société. Le café n’est plus partagé mais subi et imposé par les passages incessants d’une intendante, qui rajoute des tasses pleines sur des tables désertées. Des rituels collectifs ratés, comme cet anniversaire et ce toast qui ne sera jamais porté, sonnent comme une remise en question même du sens de l’existence. 

    À défaut de dialogues, de courtes tirades ponctuent la pièce pour nous délivrer de notre torpeur, sans forcément renforcer l’espoir et la profondeur de personnages qui semblent nous échapper. 

    Une pièce morbide qui décuple les émotions

    À la sortie de l’Avenir, une sensation d’épuisement domine, comme si nous avions passé 1h30 à chercher et à s’accrocher à une once de vie. 

    Or, qui dit vie dit nature, et celle-ci n’a aucune place dans ce lieu, si ce n’est symboliquement dans un vase de fleurs fanées, changé à intervalles réguliers. Un rayon de soleil apparait également de temps à autre et attire les êtres sur scène autant que le chaos. Ces derniers offriront d’ailleurs aux spectateurs plusieurs extraits de chants en chœur sensibles et touchants, révélant les derniers traits de leur humanité bien cachée. 

    Au final, les rideaux et les masques tombent presque en même temps et ne donnent rien à voir de plus ni à comprendre. Peut-être souhaitait-on simplement rappeler que malgré le vide, les tempêtes et l’incertitude, le futur s’écrira toujours à plusieurs. 

    Derniers Articles

    Écriture et dramaturgie Bogdan KikenaMise en scène Magrit CoulonAvec Raphaëlle Corbisier, Emmanuelle Gilles-Rousseau, Romain Pigneul, Jules Puibaraud, Claire Rappin Du 06 novembre au 23 novembre 2024Au Théâtre NationalLes 4 et 5 décembre à la Maison de la Culture de Tournai Dernier volet d’une trilogie sur les lieux communs, l’Avenir,...L’Avenir : coincés dans une inaptitude à vivre