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    La religieuse : une martyre au théâtre

    De Diderot, mise en scène de Daniel Scahaise, avec Dolorès Delahaut, Stéphane Ledune, Julie Lenain, Hélène Theunissen

    Du 13 janvier au 14 février 2015 à 20h15 au Théâtre de la place des Martyrs

    Diderot s’est attiré bien des foudres posthumes en léguant à la postérité son manuscrit de La Religieuse. L’auteur lui-même eut préféré qu’il ne soit jamais rendu public, et pourtant, aujourd’hui, ce texte est parmi ses œuvres celle que l’on lit le plus volontiers. Les sujets qui y sont exploités n’ont pas pris une ride. Ainsi, les abus commis par les institutions religieuses ou l’enferment forcé et contraint sont des thèmes qui interpellent le lecteur moderne avec toujours la même force, et cela d’autant plus lorsqu’ils sont traités avec tout le génie dont fit preuve l’un des penseurs les plus remarquables des Lumières.

    En effet, La Religieuse est un tel chef-d’œuvre que ses adaptations abondent, que ce soit dans le domaine du cinéma, celui de la bande dessinée ou, bien sûr, au théâtre, comme le propose aujourd’hui le Théâtre des Martyrs, en collaboration avec le Théâtre en Liberté. Or suffit-il de transposer un chef-d’œuvre de la littérature au théâtre pour obtenir une grande pièce de théâtre ? Sans doute pas, malheureusement… Mais voyons plutôt de quoi il retourne.

    Au commencement, Suzanne Simonin, alias la religieuse, est seule sur scène. Elle passe la première partie de la pièce avachie devant son pupitre, feignant d’écrire à la plume ses mémoires, quitte à tourner le dos au public. Plutôt que d’interagir avec les autres acteurs, elle se borne presque à un rôle de narratrice. Peu à peu, au fur et à mesure que sa situation lui échappe, les trois autres acteurs prennent possession de la scène. Et les malheurs ont beau s’acharner sur son sort, la pièce peine à décoller pour de bon ; le spectateur ne parvient pas à éprouver une véritable empathie à l’égard de la religieuse. Le tout manque de vie, de fantaisie peut-être, bien que le sujet ne se prête pas vraiment à la fantaisie.

    Assurément, l’œuvre originale est respectée. On ne se permet pas d’en altérer les phrases ou l’esprit. Les coupures sont néanmoins nombreuses, de même que les ellipses, et cela au risque de mettre en péril celui qui n’est pas déjà familier au texte de Diderot. Qui plus est, le rythme est plutôt soutenu, les phrases s’enchaînent rapidement alors que, parfois, l’on souhaiterait pouvoir s’imprégner plus longuement de l’ambiance de la pièce.

    En somme, bien que l’austérité de la mise en scène l’emporte sans doute sur le lyrisme du texte, nous soulignerons la belle prestation des acteurs et le respect dont témoigne cette adaptation envers l’œuvre de Diderot.

    Ivan Sculier
    Ivan Sculier
    Journaliste du Suricate Magazine

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