La Fille dans le brouillard
de Donato Carrisi
Thriller
Avec Toni Servillo, Lorenzo Richelmy, Galatea Ranzi
Sorti le 25 septembre 2019
Enquêteur médiatisé suite à une affaire ayant défrayé la chronique, le commissaire Vogel (Toni Servillo) est chargé de retrouver la jeune Anna Lou, disparue dans un petit village de montagne. D’une piste à l’autre, celui-ci en viendra à suspecter un enseignant d’apparence irréprochable. Ne disposant que de peu de preuves, il décidera de livrer l’homme aux journalistes, espérant le faire craquer.
Premier film du réalisateur Donato Carrisi, La ragazza nella nebbia constitue une réelle surprise malgré quelques grosses faiblesses.
Rapidement, on pensera à plusieurs grands films tels que The Pledge (Sean Penn, 2001) pour l’apparente perte de repères du détective dès son apparition à l’écran. Plus tard, lors de la médiatisation de l’enquête, c’est aux célèbres Network : main basse sur la télévision (Sidney Lumet, 1976), Un après-midi de chien (Sidney Lumet, 1975) ou encore à Mad City (Costa-Gavras, 1997) que l’on songera.
En effet, la réflexion quant à la place laissée aux médias est probablement le point le plus fascinant de cette première réalisation signée Donato Carrisi. Là où Un après-midi de chien ou Mad City se servaient des journalistes pour ériger les criminels montrés à l’écran en victimes, La Fille dans le brouillard prend le contrepied de cette logique pour jeter l’opprobre sur un homme au-dessus de tout soupçon. Ce faisant, le réalisateur montre à quel point les journalistes en quête de sensationnalisme peuvent s’avérer destructeurs. Mais plus encore, la stratégie du commissaire Vogel constitue un véritable coup de poker qui manifeste à quel point le feu des projecteurs peut parfois conduire à certains excès.
Dans ce jeu du chat et de la souris dans lequel l’enquêteur persécute un homme que peu d’éléments semblent incriminer, Vogel est un homme aux méthodes peu orthodoxes, dans la lignée de Serpico, Bullitt ou de l’Inspecteur Harry. Sauf qu’il n’est en rien un homme d’action mais tout au plus une sorte de marionnettiste qui utilise les médias pour parvenir à ses fins.
Ainsi, La Fille dans le brouillard déplace sans arrêt la frontière entre le bien et le mal, soulevant plusieurs questionnements moraux. Car la fin justifie-t-elle réellement les moyens ? Vogel est en réalité un policier qui choisit de suivre ses intuitions, sans sembler une seule seconde envisager la possibilité de se tromper.
Le tout est encore souligné par quelques belles atmosphères et divers retournements inattendus. En effet, tout au long de ses 128 minutes, La ragazza nella nebbia parviendra à se redéfinir et à réorienter son intrigue de façon cohérente sans que le spectateur s’y attende toujours.
Paradoxalement, c’est également ce point qui constitue la plus grosse faiblesse du long-métrage, car ces changements liés à un montage pas toujours judicieux entraîneront d’énormes baisses de rythmes à plusieurs moments. Dans certains cas, ils permettront même d’anticiper la suite de l’intrigue… Donato Carrisi saura néanmoins compenser ces faiblesses par un dénouement original.
En somme, La Fille dans le brouillard est un premier film doté de quelques faiblesses mais possédant également de solides qualités et une originalité thématique qui valent largement le détour.