Scénario : Reinhard Kleist
Dessin : Reinhard Kleist
Éditeur : Casterman
Sortie : 10 juin 2020
Genre : Roman graphique
Déjà auteur d’un biopic sur Johnny Cash et Nick Cave, Reinhard Kleist nous revient pour évoquer le destin tragique du premier boxeur homosexuel, Emile Griffith, dans le très beau roman graphique Knock out !
Un boxeur qui ne voulait pas en être un
Une nuit, dans les rues sombres d’une grande ville américaine, un homme éméché quitte un immeuble. Alors qu’il se déplace péniblement en titubant, trois hommes armés de battes de baseball lui tombent dessus. Tout en le rouant de coups, ils profèrent des insultes homophobes et racistes. Alors qu’il gît dans son sang, tel un fantôme, un homme encagoulé équipé de gants de boxe s’approche de lui et entame une conversation. Ce mystérieux personnage semble connaître le vieil homme qui récupère doucement en étant assis au sol. Les deux hommes reviennent sur le passé de boxeur professionnel de l’homme saoul. Il confesse qu’il n’a jamais voulu faire ce sport et que c’est par le plus grand des hasards qu’il l’a pratiqué…
Discrimination sous toutes ses formes
L’histoire se décline sous forme de dialogue entre Griffith et ce fantôme, dialogue grâce auquel l’auteur nous retrace la carrière de ce boxeur peu orthodoxe. Et contrairement à un film comme Rocky ou tout autre récit décrivant le rêve américain sous l’une ou l’autre de ses formes, Knock out ! en raconte plutôt les faces sombres. Faisant écho à une actualité malheureusement toujours présente, l’auteur nous parle du racisme et de l’homophobie au quotidien dans la société américaine. Car si nous avons pu assister à une timide ouverture quant à la place des gens de couleur dans le sport depuis quelques années, il n’en était pas question dans les années 50, époque à laquelle débute ce récit.
Si Emile Griffith a pu devenir champion du monde de boxe, c’est parce que c’était le seul sport dans lequel les exclus et les laissés pour compte avaient une mince chance de percer. Bien entendu, ceux-ci devaient entrer dans le moule et se conformer à l’image de bêtes sauvages auquel le public les assignait. Et c’est là où notre boxeur modiste s’est heurté à un second mur d’incompréhension et de haine, lui qui était homosexuel et parlait plus volontiers de mode que de sport, loin des standards de virilité du boxeur moyen.
Au final, le lecteur en apprendra beaucoup sur le racisme quotidien et le regard des gens par rapport à la différence dans ce très beau roman graphique. Une œuvre à conseiller donc, au sujet toujours d’actualité malheureusement, 50 ans plus tard…