Du Groupe Sanguin, avec Yannick de Coster, Adrien Hoppe, Hélène Lacrosse, Anaïs Spinoy. Du 7 mars au 18 mars 2023 au Théâtre Marni.
Dans un bruit de turbines qui montent en vitesse, quatre personnes prennent place dans ce qui ressemble à un cockpit. à la fin du compte à rebours, les vibrations du décollages secouent l’habitacle dans un vacarme assourdissant. Dans les hauts-parleurs, la voix de Houston ordonne d’avorter la mission, mais les pirates de l’espace ne l’entendent pas de cette oreille.
Ceux qui se présentent comme le Réseaux viennent de s’envoler à bord du seul prototype d’une nouvelle navette, hyper-performante, hyper-sophistiquée et hyper-chère. L’engin devait servir à aller piller les ressources de la planète Mars. L’engin se dirige désormais vers Proxima Centauri, qu’il atteindra dans quatre ans et trois mois, où la mission fondation ambitionne d’implanter une nouvelle humanité épanouie.
Dans le poste de commandement, Adri, un psychiatre chargé de veiller au bien-être de l’équipage, décortique chaque mot prononcé par ses collègues dans l’espoir d’y trouver un sens caché. Plus prosaïque, Yaya ne jure que par les mathématiques et considère que l’optimisme n’a pas beaucoup d’importance ici : « on y arrive ou on n’y arrive pas, c’est tout ».
Dans le labo, Nana se livre au clonage de fleurs qu’elle fertilise avec du sang menstruel. Le manque est violent pour cette femme qui a l’impression d’avoir laissé une partie d’elle même sur terre. A côté d’elle, Lena prend soin du mycélium, le cerveau souterrain des champignons qui sera utilisé dans l’espoir de créer de nouvelles symbioses et espèces.
Mais tout ne se passe comme prévu. Le mycélium que Lena a également fertilisé avec son sang menstruel est en pleine mutation et a intégré le code génétique des quatre voyageurs. On apprend ainsi que, outre Lena qui en contrôle l’accès, ses collègues ont tous pénétré dans le labo, et y ont même baisé. Il naîtra de cette séance de fornication un mycélium humain hermaphrodite qui recevra le prénom de Adève.
Mais l’arrivée du mutant perturbe l’équipage qui a tendance à gagatiser. Adri veut reprendre les choses en main et s’apprête à évacuer Adève par le sas de la navette. « Si choisir c’est renoncer, nous choisissons de renoncer pour ne plus devoir choisir », dit-il. Les autres s’y opposent, le psychiatre n’en démords pas, la tension monte. Il apparaît qu’il y a interaction entre le mutant et le mycélium qui perd toute vigueur, ce qui met en péril la mission fondation. Il renonce.
Tiré d’une écriture collective avec pour point de départ la collapsologie, qui envisage les risques, causes et conséquences d’un effondrement de la civilisation industrielle, J’voudrais pas rater la fin du monde envisage surtout les possibilité de survie à la fin de notre monde. Les membres du Collectif Le Groupe Sanguin optent clairement pour un changement de monde. ils prônent la transformation afin de créer de nouvelles relations symbiotiques basées sur l’échange et non plus la domination et l’exploitation.
En contrepoint de l’aventure spatiale, la pièce est ponctuée d’interventions de deux marionnettes formant un couple de personnes d’un certain âge. Elles incarnent ceux qui constatent la détérioration de l’environnement mais ne modifient en rien leur comportement.
Cette fable écologique qui s’adresse à tout public dès 14 ans, impressionne par le caractère très élaboré de la réflexion et du propos basé sur des recherches manifestement très fouillées. La scénographie inventive et ludique met en valeur le jeu des comédiens très convaincus qui ne font pas l’impasse pour autant sur quelques traits d’humour.