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    Improspection : chaque soir est différent au théâtre Le Public !

    De Bernard Cogniaux, avec Bernard Cogniaux, Jean-Marc Cuvelier et Marie-Paule Kumps

    Du 9 mai au 24 juin 2017 2017 à 20h30 au Théâtre Le Public

    De l’avis de Jean-Marc Cuvelier, « l’improvisation est au théâtre ce que le jazz est à la musique« . De par son caractère irréversible, l’improvisation peut voir surgir le mauvais comme le meilleur. C’est donc d’humeur réceptive et curieuse qu’il y a lieu de se rendre au spectacle Improspection.

    Quoiqu’avec le trio composé par Jean-Marc Cuvelier, Bernard Cogniaux et Marie-Paule Kumps, on ne prend que peu de risque d’être déçu. Il faut dire que les acteurs ont de la bouteille. Le premier, Jean-Marc, improvise sur scène depuis 33 ans et cumule les récompenses : sept titres de champion de Belgique, deux de champion du monde en Ligue d’Improvisation et le prix Robert Gravel du meilleur jouteur international. Il a également été le directeur artistique de la Ligue d’Impro belge pendant 10 ans.

    Ses comparses, Bernard et Marie-Paule, roulent aussi leur bosse dans le milieu depuis un bon moment. Partenaires à la scène et dans la vie, ils se sont d’abord rencontrés à la Ligue d’Improvisation. Par la suite, ils ont eu l’occasion de jouer ensemble dans un spectacle intitulé Noces où ils incarnaient un jeune couple. Ça ne s’improvise pas…

    Amour et improvisation semblent donc étroitement liés dans le chef de nos acteurs qui prennent un plaisir communicatif à jouer, tant au sens théâtral que littéral du terme. D’ailleurs, plus que de l’amour, c’est de la rage qui semble les habiter pour les pousser à accepter de signer pour pas moins de 35 dates en sept semaines avec le théâtre « Le Public ». Un rythme effréné qui ne semble pourtant pas avoir d’emprise sur leurs ardeurs.

    Le spectacle se construit en une succession de petites saynètes, d’une petite dizaine de minutes. Le fil conducteur est la volonté de répondre aux questions suivantes : Peut-on rire de tout? Et, particulièrement, de ce qui n’est pas drôle ? Peut-on parler avec légèreté des sujets graves et actuels tels que la maltraitance, les droits de l’homme, la maladie, les attentats, les dessous de la politique, l’homophobie ? Et peut-on le faire en improvisant, sans le filtre de l’écriture préalable ?

    Il semble que oui, au vu de l’enthousiasme du public et de la bonne humeur générale. Le trio est pétillant et fait montre d’une belle entente et d’une alchimie qui fait mouche, et ce malgré la rudesse des spectacles d’improvisation qui, de par leur nature, ne permettent pas de soutenir le jeu des acteurs par l’artillerie des costumes et des décors. Une contrainte du vide déjouée par le professionnalisme des acteurs-improvisateurs qui, pour nous raconter leur histoire, usent du mime, de leur sens aigu de la répartie et d’une confiance mutuelle que l’on devine grande.

    Petit bémol cependant : on constate que, malgré la lourdeur des sujets abordés, la joyeuse bande reste relativement sage. Elle se joue de clichés en revêtant les costumes imaginaires de victimes et bourreaux. Cependant, rien dans leur interprétation ne laisse présager d’une prise de position ou n’exprime d’opinion. Peut-être était-ce là pourtant le sel du spectacle. Un constat qui n’est cependant pas gravé dans le marbre étant donné le caractère unique de chaque improspection.

    A cet égard, il est à souligner que c’est aussi le public qui fait le jeu. Il est invité à donner son avis, à proposer des clichés, personnages, phrases de lancement, photos ou contextes afin de doper son contenu. La scène est organisée à cet effet autour d’un dispositif bi-frontal brisant le quatrième mur et permettant aux spectateurs d’être inclus dans la représentation. En outre, cette configuration donne de l’ampleur aux joutes verbales entre les acteurs et leur permet de rentrer, sortir et changer de personnage facilement, d’un bout à l’autre de l’espace scénique.

    De leur performance collective, on retient des improvisations construites et bien ficelées, dont on ne sait où elles nous mènent ; un rythme soutenu par des répliques qui s’enchaînent avec peu de gaspillage. Une matière brute frétillante, à consommer dans l’instant et sans modération puisque deux spectacles ne sont jamais les mêmes. Une façon peut-être de tromper l’ennui ?

    Katelyne Marion
    Katelyne Marion
    Journaliste au Suricate Magazine

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