« Nous sommes tous des décideurs ». C’est le message lourd de sens que veulent transmettre les organisateurs du Festival Millenium après la tragédie du 22 mars. Pour eux, pour nous, il n’est pas question d’abandonner cet esprit combatif et engagé. Le Suricate est honoré de participer à cette action et de continuer à vous partager nos expériences.
Au vu des événements douloureux, c’est avec une plus grande difficulté que nous avons visionné Among The Believers, un documentaire sur le radicalisme religieux au Pakistan. Les réalisateurs Mohammed Ali Naqvi et Hemal Trivedi ont suivi le guide suprême de la « Mosquée Rouge », une école islamique radicale qui instruit les enfants dès leur plus jeune âge à devenir des djihadistes. Pendant le visionnage du film, nous ne pouvons qu’être outrés. A travers des témoignages effrayants et des images parfois choquantes nous découvrons une institution malsaine dans un pays en sang, divisé par la religion. La question se pose alors : comment ces « écoles » trouvent-elles leur place ? Pour le « chef » de la Mosquée Rouge, elles sont le symbole d’un gouvernement raté et d’un pays en perdition. La Mosquée Rouge accueille les jeunes (souvent orphelins et désormais malléables à souhait) en leur offrant un toit, de la nourriture, des vêtements et des soins médicaux gratuits. Mais des voix et des violentes protestations s’élèvent contre les pratiques/idéologies de la Mosquée Rouge et les barbaries commises par les extrémistes. Un reportage engagé qui fait froid dans le dos et nous laisse bouche bée face à la montée de violence, de peur et de haine à laquelle le Pakistan fait face aujourd’hui.
Changement d’ambiance avec Broken Land où nous atterrissons dans la nature aride de l’Arizona aux Etats-Unis. Les Suisses Luc Peter et Stéphanie Barbey nous dévoilent le quotidien et le ressenti de sept américains qui vivent à la frontière américano-mexicaine. Chacun est affecté à sa manière par le « mur » et les caméras de surveillance supposées contrer la migration illégale entre les deux nations. Le documentaire nous offre un portfolio d’avis différents sur la question. Sans voix off, les cinéastes laissent chacun exprimer leur paranoïa, leurs peurs ou leur indignation. L’argument principal en faveur d’un contrôle beaucoup plus strict est la drogue et la peur de l’inconnu. « On ne peut pas laisser la frontière sans surveillance en sachant qu’il y a de la drogue qui passe. Ce n’est pas raciste de vouloir protéger notre frontière. On ne sait pas s’ils ont des bombes ». Certains n’hésitent pas à mettre des caméras partout autour de leur maison et de dormir avec leur arme « au cas où ». L’absurdité à l’américaine. Mais d’autres s’indignent face à ce mur et à ces caméras. Nous retiendrons les mots d’une femme engagée à aider les migrants « Les caméras sont censées nous protéger. De quoi ? Je ne sais pas. Dès qu’on impose une frontière imaginaire, cela a posé des problèmes. Le monde extérieur rime avec la peur. C’est difficile d’apprendre la confiance à nos enfants dans ces conditions ». Entre des images somptueuses de l’environnement désertique prises au crépuscule et des plans accablants sur des vêtements ensevelis, Broken Land nous fait frissonner sur la réalité des frontières physiques.
Continuez à soutenir les idéaux du Festival Millenium. De nombreux documentaires sont encore diffusés jusqu’à la fin de la semaine. Cultivons-nous, indignons-nous dans la plus grande humilité. Nous en avons tous besoin.