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    FATP 2017 : Kalès de Laurent Van Lancker

    Kalès

    de Laurent Van Lancker

    Documentaire

    Présenté au Festival Filmer à tout prix

    Elle s’appelait la jungle. Elle a disparu mais, rappelez-vous, vous l’avez vu à la télé, dans les journaux, sur les réseaux sociaux. Comme un problème économique, politique, sanitaire. Aujourd’hui, la jungle a disparu mais hier, un bout de la France, celle avec un F majuscule, face à la mer, par delà les vents contraires, n’était autre qu’un bidonville. Laurent Van Lancker est alors bénévole sur les camps de réfugiés de Calais, lorsque le besoin de tourner Kalès est née. Filmé de l’intérieur par ceux qui l’habite, le bidonville à coeur ouvert, se livre dans l’intimité.

    Pour autant, ces images malgré tout transmettent un tout autre message. Pour qu’on ne les oublie pas, qu’on « se rappelle d’eux », ils se sont, eux aussi, emparés de la caméra. Une sacrée leçon de vie. Le récit se construit à travers des bribes de quotidien à focalisation variable, par un cadre qui se tend comme un bâton de vérité. Bousculés de tentes en tentes à travers les semblants de ruelles creusées – peut-on dire naturellement ? – Kalès dévoile un triste réalité. Ici, une micro-société s’est construite. Khalid, Abdel et les autres, tour à tour, nous racontent leurs rêves et nous prouvent, encore et toujours, la faculté d’adaptation de l’homme. L’espoir n’est pas une option dans la jungle, il est dans chaque geste, dans chaque rêve. Créer pour résister ? Kalès est un élan de solidarité créateur.

    Parmi le brouhaha constant que peuvent faire quelques milliers de réfugiés, un vent claque perpétuellement à l’oreille et amène une charge de pénibilité supplémentaire qui s’émancipe de toute larmoyance. Les éclats de rire et la musique qui ponctuent la production ne cessent ne nous ramener à cette réalité dont nous autres, ne serions jamais capable.

    Gangrénée par le manque de respect de cet autre, la France n’a eu pour autres réponses que celles d’évacuer, démanteler ou entasser des hommes et des femmes qui, aux portes de leur avenir, se sont retrouvés considérés comme les parias de l’Europe dans des conditions plus que déplorables. La réponse de Laurent Van Lancker, bien que dans l’urgence, s’arme pour autant de poésie comme clé de voûte à l’impasse politique.

    Audrey Lenchantin
    Audrey Lenchantin
    Journaliste du Suricate Magazine

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