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    « Éclaireuses », lumière sur un lieu inspirant

    Eclaireuses
    de Lydie Wisshaupt-Claudel
    Documentaire
    Sorti le 27 avril 2022

    Né d’une vive attraction et d’une rencontre hasardeuse, le projet Éclaireuses est hybride, le dialogue entre pédagogie, œil cinéphile et questionnements sociologiques en font une pièce cinématographique d’une vive actualité.  Ce sont des moments doux et sensibles que Lydie Wisshaupt-Claudel retranscrira à l’écran pour cerner la notion d’école et de la place qu’on lui accorde.

    La jeune réalisatrice a d’abord un coup de cœur pour le blog de l’école éphémère, elle y lit – en plus des ambitions de pédagogie alternatives – une volonté poétique de lier texte et image et ressent l’envie d’aller pousser la porte de cet espace singulier. C’est d’abord à un refus qu’elle se heurte lorsqu’elle va à la rencontre de Juliette et Marie sont alors en phase transitoire. En effet, leur démarche pédagogique est avant tout basée sur la confiance mutuelle, cette confiance fragile et difficile à acquérir est précieuse et ne doit pas être brisée par une caméra et l’équipe qui l’accompagne, même si elles en reconnaissent l’intérêt artistique et social. La seconde interaction des trois jeunes femmes est le fruit du hasard, dans la rue Lydie les abordent, poussée par une force magnétique. Cet évènement fortuit permet aux deux professeurs de percevoir ce projet sous un angle différent. Après plusieurs temps de réflexion collectif, un processus est mis en place : Lydie viendra s’intégrer au lieu, en y participant activement, pas en tant qu’enseignante, mais plutôt comme une aide extérieure, permettant aux enfants de se sentir à l’aise avec sa présence. Le contexte de la rentrée fait qu’elle est acceptée avec fluidité par les nouveaux arrivants. La caméra intrigue peu les jeunes gens qui vaquent aux activités scolaires sans timidité. À contrario elle produit chez les deux enseignantes un sentiments curieux, un professeur n’est en effet pas habitué à exercer son activité sous le regard attentif d’un autre adulte, excepté dans le cadre oppressant d’une inspection. Le temps fera son effet et son équipe se fondra par la suite dans le décor ne perturbant en rien la sérénité du lieu.

    L’objectif du film-documentaire et d’évoluer dans un cadre sécurisant afin de filmer des moments authentiques. Plusieurs sessions de tournage se réalisent donc durant deux ans et demi permettant à la caméra de capturer une vision globale et subtile à la fois. Le projet de Marie et Juliette permet à la réalisatrice de nourrir sa réflexion cinématographique d’une problématique sociale actuelle. Le projet des Éclaireuses permet à Juliette et Marie d’avoir un regard extérieur sur cet espace très protégé. Confronter l’univers du social et du cinéma permet d’ouvrir de nouveaux cheminements réflexifs concernant la manière d’apprendre, de juger et de collaborer. Il s’agit donc d’un projet co-construit où la notion d’apprentissage s’ancre au processus filmique lui-même. Cet espace de vie est en perpétuelle évolution, on le voit à travers les dialogues, les débats, les réunions ou les brefs échanges avec les parents. Ressouder les liens, penser un lieu rassurant pour des personnes en exil, préparer les enfants à un avenir incertain sont les fondements qui forment le centre de gravité de l’école éphémère. Un tel lieu se heurtent à d’inévitables paradoxes, il doit être sécurisé et ouvert, les enfants doivent être cadrés et libres, les parents autonomes et délégateurs. C’est de toutes ces régulations que naissent les réflexions qui constellent le film.

    “Apprendre” est un verbe hybride dont la définition n’est pas figée, la coopération, la liberté et l’inclusivité semble être les conditions pour permettre à ces familles de trouver un refuge, plus que les règles dites scolaires. Cet ancrage permet aux enfants d’intégrer la notion de rituels, de routine, c’est cette routine qui vient alimenter le récit filmique. Un témoignage de pédagogie alternative qui offre l’opportunité à des exilés de préparer les enfants au milieu scolaire, mais surtout de s’intégrer sur le plan social. La qualité esthétique du film, qui équilibre moment de silence méditatif et discours bavard qu’engendrent ces problématiques sociales, apporte poésie et douceur à des sujets que certains peuvent trouver rébarbatifs, telles que les questions de financement ou d’administration. Nous immergeant dans le quotidien d’un espace inspirant, ce film intéressera un public hétérogène, car les réflexions qu’il suscite ne concernent pas seulement les minorités ou les enseignants, mais bien notre manière de vivre-ensemble et d’inculquer valeurs et savoirs aux enfants. Des questionnements – et non des réponses ou des statistiques – essentiels dans le monde chaotique d’aujourd’hui.

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