Dark Waters
de Todd Haynes
Biopic, Drame
Avec Mark Ruffalo, Anne Hathaway, Tim Robbins
Sorti le 26 février 2020
On la connaît tous, l’histoire de David terrassant Goliath et pourtant, on ne s’en lasse pas. Que ce soit dans Silkwood, Spotlight ou encore dans le primé Erin Brockovitch, ils ont la cote ces humanistes démunis qui luttent contre de puissants immoraux. Et comme en ce moment, on les aime encore plus quand ils parlent environnement, c’est au tour de Robert Bilott d’être mis à l’honneur dans le dernier film de Todd Haynes. Personne n’aurait pu imaginer, à l’époque, que ce petit avocat ambitieux et défenseur des grandes entreprises exhumerait les secrets toxiques enfouis par le groupe industriel DuPont, spécialisé dans la recherche en chimie. Et pourtant, il l’a fait sans jamais se laisser décourager et son combat qui aura duré plus de quinze ans est, pour la première fois, racontée sur grand écran.
Alors il est évident que cette histoire vraie est romancée. Et que de ce fait, des choix artistiques ont dû être faits. On pourrait parler de la musique lente et dramatique qui apporte la tension, de Ruffalo qui interprète un Bilott sous pression, ou encore du rapport de proximité qui s’établit par les mouvements de la caméra. On pourrait aussi parler de l’image ternie et vieillie qui donne l’impression d’être plongé dans ce que les années 90 ont de plus sombre à offrir. Mais finalement, ce qui ressort vraiment de Dark Waters, ce n’est pas tant sa réalisation mais la réalité choquante qu’il offre à voir – car il est évident qu’on ne peut pas sortir de ce film sans être au mieux bouleversé, au pire affolé. On lui pardonne d’ailleurs aisément les quelques longueurs qui apparaissent sur la fin, car il semble difficile avec un tel sujet d’être à la fois complet et complètement divertissant.
Mais encore plus que son sujet, c’est la réception du film qui risque de faire polémique. Car si DuPont – à qui l’on doit entre autres le lycra et le nylon – a su se reconstruire après la série de procès que lui a collée Bilott, elle risque de souffrir de la mauvaise presse que pourrait lui faire Dark Waters. Et elle n’est pas la seule. D’autres grosses industries qui ont déjà adopté le produit que condamne le film, pourraient redouter un soulèvement de la population – du moins c’est ce que considère la Bank of America/ Merrill Lynch et ce qu’espère Todd Haynes ainsi que Mark Ruffalo. En somme, aller voir le film c’est déjà faire un petit geste contre l’impunité des grandes industries. Et lutter pour la transparence des biens qu’on consomme, c’est encore mieux.