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    Daniel Guichard : « Avec la maturité, je vois les choses de manière un peu différente »

    Le 5 février prochain, au Palais des Beaux Arts de Charleroi, Daniel Guichard viendra présenter son dernier album intitulé Notre Histoire. Devant un public qui l’a toujours suivi dans sa longue carrière, Daniel Guichard tentera de faire passer ses émotions au travers de paroles bien écrites car réfléchies.

    Rencontre avec cet homme à la fois franc et sincère.

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    Pour la jeune génération, vous êtes avant tout l’auteur de Mon vieux, Le gitan ou encore La tendresse. Des morceaux ayant déjà plus de trente ans. Cela pourrait-il être la conséquence de votre pause qui a duré vingt ans ? Et pourquoi avez-vous fait cette pause ?

    J’ai fait une pause discographique – et pas scénique – pour une raison très simple : je suis producteur de ce que je fais.

    Vous savez, j’ai eu une radio pirate à Paris et j’ai donc la notion de ce qui est radiophonique. Vous pouvez faire les plus belles chansons du monde, qu’elles soient discographiques ou scéniques, elles ne seront pas pour autant des bonnes chansons de radio. Or, si vous voulez amplifier votre notoriété, il faut que vos chansons soient radiophoniques.

    Aujourd’hui, la concurrence est rude. Entre les années 80 et les années 2010, beaucoup de choses sont arrivées. Quand le côté disco binaire a été dépassé, il y a eu toutes sortes de styles qui sont arrivés. Personnellement, je ne voulais pas faire un style qui ne me correspondait pas. Et d’un autre côté, je ne voulais pas faire le têtu et faire le morceau que j’avais envie de jouer, cela aurait fait vieux con.

    J’ai dès lors attendu. Si je n’ai pas de bon titre, je ne fais pas.

    C’est pourquoi, aujourd’hui, on a fait un bon album avec Notre Histoire. Certes, il n’y a pas vraiment de tubes sur cet album, mais c’est une bonne reprise de contact au niveau discographique.

    Avez-vous perdu des fans suite à cette absence discographique ?

    Le fait de ne pas faire un disque ne change pas le cours de l’histoire. Par contre, le fait de faire un très mauvais disque oui !

    Je n’ai pas eu envie de faire des disques ou des émissions télévisées pour dire « regardez, j’existe ! ».

    Est-il plus difficile de faire un album aujourd’hui ?

    La définition technique des FM est telle que vous ne pouvez plus enregistrer comme il y a 30 ans. Les bases et la dynamique des enregistrements sont différents.

    Vous êtes obligé de travailler très bas, car vous ne pouvez pas vous permettre la moindre saturation. Après, une fois que c’est fini, vous commencez à masteriser en trafiquant les sons. Cela donne une forme de musique assez intéressante, mais qui n’est pas tout à fait la mienne.

    Essayez de faire de la variété avec ça, vous verrez, ce n’est pas simple.

    Qu’est-ce qui vous plait dans la musique radiophonique actuelle ?

    Il y a de très bonnes choses. Le Belge Stromae, mais aussi Louane, Zaz, Kendji ou Matt Pokora.

    Ce qui est bien, c’est qu’on ne cible plus uniquement un genre de public, il y a de tout. Même si les textes sont simples, les auteurs sont meilleurs aujourd’hui qu’il y a quinze ans. Les compositeurs sont meilleurs également, car ils n’ont plus le complexe d’essayer de faire de la chanson tout public.

    Le seul problème du contexte actuel, c’est qu’on annonce la couleur dès le départ. Si vous voulez chanter, personne ne va vous dire de faire deux titres, vous devrez faire un album. À l’époque, on commençait par deux titres. Cela permettait de bien faire tourner les morceaux et six mois plus tard, vous pouviez ressortir un deux titres. Et avec le temps, on faisait un douze titres avec deux ou trois succès. Aujourd’hui, c’est l’inverse.

    Plein de gens arrivent directement avec un album de nos jours. Evidemment, ce ne sont pas eux les responsables.

    Pour quelle raison ?

    Le prix de fabrication d’un cd que vous ayez douze titres ou deux est quasiment le même. La seule différence, ce sont les droits auteurs. Une fois que c’est fait, vous allez vendre votre deux titres à 4€ alors que le douze titres peut se vendre 16€.

    Un distributeur va donc dire à un artiste qu’il a tout ce qu’il faut pour faire un album, mais ce n’est pas vrai. En réalité, il a un titre valable. Et je peux vous dire qu’on ne tient pas une carrière avec un titre, sauf rares exceptions.

    Pour en revenir à votre album, Notre Histoire, on y ressent davantage de mélancolie que dans les précédents…

    La tendresse, c’était il y a 45 ans. Mon vieux, c’était il y a 42 ans, etc. Depuis, il s’est tout de même passé plein de choses. Avec la maturité, et prenant de l’âge, je vois les choses de manière un peu différente.

    Ma vie de tous les jours prenant toujours le pas sur ma vie de chanteur, il est normal que mes chansons s’en ressentent. Si il y a de la mélancolie, c’est parce que c’est présent. Mais ce sont des mélancolies par rapport à la vie de tous les jours. La chanson Reste, que j’ai écrite avec mon fils Gabriel, fait référence au départ de mon beau-père qui vivait la fin de sa vie. Cette chanson est le « Mon vieux » de mon épouse.

    Des chansons sont donc dans l’émotion et d’autres sont plus légères, voire même de grosses conneries. (sourire)

    Justement, vous avez affirmé récemment ne plus chanter vos tubes comme vous les chantiez avant. Que, finalement, vous les chantez mieux aujourd’hui. Pourquoi « mieux » ?

    Je n’ai quasiment jamais arrêté de chanter. Pendant tout ce temps, j’ai appris plein de choses, notamment à chanter devant 5000 personnes avec un playback-orchestre et une technique très douteuse. Dans des endroits où l’ingé-son était DJ de boîte de nuit ou employé à la mairie pendant la semaine. Cela donnait des choses insensées comme des bandes à l’envers et des sons horribles. J’ai donc du m’adapter : chanter moins fort, aller dans le public, faire moi-même la sono.

    Cela permet de chanter intelligemment. Je me suis aperçu que ce qui est important est l’émotion que vous communiquez. C’est pour cette raison que des chansons comme Mon vieux ou La tendresse, je ne les chante plus pareil.

    Il y a quelques temps déjà, vous avez refusé de participer à la tournée Âge tendre et tête de bois. Pour quelle raison ?

    Premièrement, parce que je ne m’entendais pas avec le producteur. Ensuite, le concept ne me concernait pas vraiment. Il concernait surtout des artistes adorables et gentils qui avaient fait un tube ou deux, à quelques exceptions près comme Annie Cordy. Ceux qui n’avaient fait qu’un tube n’auraient jamais pu remplir une salle seuls. Alors qu’à six, ils pouvaient faire des plateaux de 4000 personnes l’après-midi et le soir.

    Le 5 février 2016, vous viendrez en Belgique, et plus précisément à Charleroi. Pourquoi ne pas avoir choisi plus de dates en Belgique et pourquoi Charleroi ?

    Car il me faut des salles assez grandes pour me permettre d’amortir le coût. Il faut savoir que j’ai douze à treize musiciens sur scène, huit techniciens, huit techniciens-road pour décharger et charger le matériel, un tour-bus – avec un chauffeur belge d’ailleurs -, deux personnes à la cuisine, une à la billetterie et ma famille. En tout, nous sommes environ trente-deux.

    Il faut donc que la salle soit suffisamment importante, car ça coûte cher. Des salles comme celle-là, il n’y en a pas beaucoup. Mais si cela ne tenait qu’à moi, je viendrais plus souvent.

    Enfin, nous avons pu nous rendre compte que vos enfants ont suivi vos pas…

    Mes enfants se sont intéressés au spectacle. Joêl fait de la production de spectacle, Gabriel fait de la musique et du cinéma, Raphaël fait des études de communication avec pour objectif de travailler avec ses frères et Emmanuelle est dans une agence de presse. Ils sont dans le métier, mais ce n’est pas moi qui leur ai dit de venir.

    Mais c’est agréable pour moi. Ce sont eux qui, par exemple, me tannent pour qu’on fasse évoluer la promo web intelligemment. C’est pourquoi le dvd va sortir et parallèlement, l’album sera diffusé sur Youtube.

    Réservez vos places en cliquant ici !

    Matthieu Matthys
    Matthieu Matthys
    Directeur de publication - responsable cinéma du Suricate Magazine.

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