Titre : D.V.
Auteure : Diana Vreeland
Editions : Séguier
Date de parution : 20 juin 2019
Genre : Mémoires, biographie
Vreeland avec un V, comme violet. Voilà comment se présente celle qui a su imposer à plusieurs générations de consommateurs sa vision de la mode D’ailleurs, c’est certainement parce que le violet n’est pas une teinte d’ordinaire appréciée que l’a adopté celle qui ne craint rien, si ce n’est l’excès de bon goût. Diana, c’était avant tout une originale.
Petite – alors que sa mère la traitait de monstre – Diana a appris, dans le monde des demi-mondains parisiens, à jouer l’insouciante et à tout exagérer sans avoir peur du ridicule. Plus tard, passionnée par les chevaux et le Japon, elle pouvait passer des heures à se peindre de céruse – qui déteignait évidemment sur son entourage et transformait son monde en blanc – tout ça juste pour ressembler à une de ces geishas qui la fascinaient tant. Et bien sûr, cette extravagance qui l’accompagne partout, fait sa notoriété. Le monstre devient papillon et s’engage d’abord au Harper’s Bazaar, dont elle sera responsable du succès, avant de devenir rédactrice en chef du Vogue américain et de finir sa carrière dans les bureaux de la Costume Institute du Metropolitain à New York.
Et c’est sur ce parcours aussi atypique qu’instructif – puisque Diana a littéralement traversé le XXème siècle – que revient l’icône dans sa biographie D.V.. Dès les premières pages, le lecteur est happé dans un monde étrange composé de Diaghilev, Nijinski, du bois de Boulogne et des costumes affriolants typiques des années vingt. Et ça ne va pas en s’arrangeant. Diana est crapahuté de Paris à New York et de Tokyo à Londres, en passant par les plaines de Cody sur lesquelles veille Buffalo Bill. Comme dans un rêve, on a du mal à croire à ce monde dans lequel tout est beau, original, singulier et riche. Et pourtant ce monde a existé à travers les yeux de D.V..
Quand on lui demande la clé de son succès, elle répond honnêtement qu’il lui a suffi de naître à Paris, sous-entendu à la bonne époque et dans la bonne famille. Alors c’est vrai que Diana Vreeland a su se construire un nom grâce à sa personnalité hors du commun et son assiduité au travail, mais elle a aussi profité d’une éducation qui lui a enseigné les codes à maîtriser dans la haute société. Sur ce point, Diana est lucide. Mais souvent, elle peut aussi se montrer arrogante, voire parfois naïve quand elle raconte les souvenirs qu’elle garde de la guerre. Diana sait qu’elle vit dans une bulle mais n’a pas conscience de l’autre réalité, celle des gens moins nantis, ce qui la rend prétentieuse et un peu agaçante pour celui qui la lit.
Mais Diana était surtout une visionnaire qui savait déceler chez les gens ce dont ils avaient besoin avant même qu’ils ne s’aperçoivent qu’il leur manquait quelque chose. Et c’est une chose exceptionnelle que d’avoir l’impression d’écouter une personnalité aussi révolutionnaire, puisque le livre, directement adressé au lecteur, est écrit sous forme de discussion. On a l’impression de prendre le thé en sa compagnie et de se délecter de toutes les petites anecdotes qu’elle raconte de manière désordonnée et qui composent les différents chapitres de sa vie. Avec ce témoignage de choix, livré par l’élite du passé, Séguier nous prouve encore une fois qu’il sait choisir les curiosités qu’il édite.