Charlie Mortdecai
de David Koepp
Comédie, Policier
Avec Johnny Depp, Gwyneth Paltrow, Paul Bettany, Ewan McGregor, Olivia Munn
Sorti le 21 janvier 2015
Charlie Mortdecai est l’anti-héros d’une série de livres policiers – bien qu’en marge du genre – écrite dans les années 70 par l’anglais Kyril Bonfiglioli. Pour son film, le réalisateur David Koepp s’est basé sur le premier volume Don’t point that thing at me. Le résultat est discutable.
Charlie Mortdecai, noble désargenté et marchand d’art versé dans l’escroquerie est en pleine crise conjugale à cause de sa nouvelle moustache. Comme si cela ne suffisait pas, lorsqu’un légendaire tableau disparaît, il se retrouve avec sur le dos le MI5, un révolutionnaire, les Russes et même sa femme. Heureusement, il peut compter sur l’aide et les muscles de Jock, son valet et homme de main, pour retrouver le tableau volé qui mènerait, dit-on, à l’or du IIIème Reich.
Au-delà d’une enquête, le film est une longue ratiocination sur la nouvelle moustache de Mortdecai. Un sujet bien à propos alors que ces protubérances faciales de follicules pileux connaissent actuellement un nouvel âge d’or sous le règne des hipsters, des individus que Charlie est d’ailleurs amené à croiser dans ses pérégrinations. Bacchantes mises à part, l’adaptation cinématographique rappelle quelque peu le rythme d’un James Bond, en moins sérieux et en moins bien.
L’enquête se déroule dans un univers peuplé de personnages plus anglais et plus aristocrates que la Queen Mum elle-même – Yes, sir ! – cabotinant à longueur de répliques. Si ce choix d’interprétation fonctionne au début, il finit par lasser au bout d’une heure quarante-sept. Il est d’ailleurs recommandé d’avoir une bonne tolérance à Johnny Depp, car ce que la bande-annonce augurait se confirme : l’acteur américain présente une caricature de lui-même, celle de ces dernières années qu’il joue encore, encore et encore… Et encore ! Quoique ce n’en soit pas la version la plus insupportable. Le rôle de Madame Mortdecai, initialement destiné à la Néerlandaise Carice van Houten (Mélisandre dans Game of thrones), est finalement revenu à la néo-diététicienne Gwyneth Paltrow dont l’interprétation reste très sommaire, aussi sympathique et élégante soit-elle. Autour du couple gravitent Paul Bettany et Ewan McGregor que l’on a déjà vus plus en forme, même s’il faut reconnaître que leurs rôles (et leur coupe de cheveux pour McGregor) ne leur laissaient pas beaucoup de liberté. Au final, l’humour du film tient peut-être plus aux rôles tertiaires comme Sir Graham, le Duc d’Asherboroughdon, Maurice ou encore à la mère adultère de l’avion.
Les initiés à la littérature bonfigliolienne regretteront aussi que le film destiné au grand public délaisse l’arrière goût-amer des aventures de Charlie Mortdecai, la « note d’angoisse métaphysique derrière le scintillement qui restera probablement avec les lecteurs bien après que les rires se soient éteints. « Après tout, c’est un conte moral » conclut plaintivement un des livres. « Vous voyez cela, n’est-ce pas ? » ». Pas chez Koepp en tous cas.
Puisque toutes les choses rentables n’ont pas de fin, Lionsgate rêve déjà à une franchise Mortdecai avec Depp, apparemment disposé à reprendre du poil de la bête dans le futur. Quant à nous, si un film Mortdecai est décent, pour ce qui est de la suite, moustache gracias, mais nous passerons notre tour.